Mise au point

AL répond à Laurent Lévy




Dans son livre La gauche, les noirs et les arabes, Laurent Lévy, alors qu’il traite des mobilisations autour de la loi contre le voile à l’école en 2004, qualifie la position d’AL de prohibitioniste. Une erreur à démentir.

Le nouveau livre de Laurent Lévy s’attache à critiquer les arguments fallacieux du camp républicain adressés, tantôt aux dérives communautaires censées affaiblir l’unité de la République, tantôt aux menaces islamistes que camouflerait le port du foulard.

Or en 2004, lors de la loi sur le voile à l’école, ce camp était composé d’acteurs inégalement issus de toutes les tendances de la gauche, le PS, les Vert et le PCF mais aussi la LCR (avec Christian Picquet et Pierre-François Grond), LO et d’autres, qui ont participé au concert consensuel de la défense de la République contre la « menace islamiste ».

L’ouvrage met en relief deux choses : le nationalisme républicain qui structure idéologiquement bon nombre d’organisations de gauche, et la non-reconnaissance de l’autonomie politique des dominé.e.s d’ascendance migratoire et (post)coloniale engagé.e.s dans une lutte qui leur est spécifique.

Il y a même des accents libertaires chez Laurent Lévy dans sa critique de la délégation politicienne du pouvoir promue par les partis politiques classiques engagés dans la course au partage de la démocratie représentative.

C’est pourquoi on ne peut être que déçu de constater que Laurent Lévy, traitant en pages 117-118, de la mouvance libertaire et des clivages réels concernant la question du foulard, se trompe totalement quant à la position d’Alternative libertaire (comme de la FA d’ailleurs, l’OCL étant ignorée) puisqu’il la qualifie de « prohibitionniste ».

Comment des organisations libertaires auraient-elles pu appeler l’État à intervenir dans un tel débat, sachant l’anti-étatisme virulent caractérisant leur identité politique ?

Là où Laurent Lévy considère la position du sociologue Saïd Bouamama (tous deux étant proches du Mouvement des Indigènes de la République) comme étant la plus respectable (en gros : « ni loi ni voile » avec une accentuation critique sur les effets violents et pervers d’une loi), il aurait dû mieux lire les articles et motions de congrès d’AL [1] pour se rendre compte que c’était grosso modo la position de notre organisation (quand la FA n’en défendait par ailleurs aucune).

Mieux, la position défendue par AL refusait l’intervention étatique, reconnaissait qu’elle s’appuyait sur un racisme et un sexisme latents, mais ne cédait pas non plus sur l’analyse de l’aliénation religieuse, dont l’auteur fait quant à lui totalement l’économie.

Dommage, le livre demeurant malgré tout intéressant, que Laurent Lévy tombe dans un piège qu’il ne cesse pas de dénoncer ailleurs : l’amalgame et les raccourcis.

L’amalgame, c’est dire que l’extrême gauche serait par nature islamophobe en raison du combat contre l’aliénation religieuse qu’elle mène. Une rhétorique qui fait légion chez les Indigènes de la république (désormais Parti des indigènes de la république) et qui, si elle est malheureusement parfois juste, est surtout un calcul opportuniste destiné à discréditer les organisations de lutte de classe vis à vis des racisé.e.s.

Nous demandons une correction à Laurent Lévy, pour que la vraie position d’Alternative libertaire soit reconnue.

[1« Religions, racisme et mouvements sociaux » in VIIIe congrès d’AL, octobre 2006 ; « Sur le voile, le féminisme, la laïcité et les lois d’exclusion » in Alternative libertaire d’avril 2004.

 
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