Benoît XVI : Un criminel en liberté




L’Église catholique se targue de défendre la vie. Mais la vie de qui ? Rarement celles des femmes enceintes qui veulent avorter, ou celles des pauvres, des homosexuels et des lesbiennes.

Avant de devenir pape, Joseph Ratzinger a été préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, une structure descendant historiquement de l’Inquisition. Ratzinger était à l’origine de nombreux textes du pape précédent. Les réactionnaires seront heureux d’apprendre qu’en matière de traditionalisme, l’original vaut mieux que la copie !

Benoît XVI tient à envoyer un message clair contre l’émancipation : « Il serait criminel de prendre les éléments de la piété populaire et de les orienter vers un plan de libération purement terrestre, lequel se révèlerait rapidement comme rien d’autre qu’une illusion. » [1]. À défaut d’être corporatiste, Ratzinger a au moins le mérite de la cohérence : il refuse toujours de reconnaître le caractère politique de l’assassinat par l’extrême droite de l’archevêque salvadorien Oscar Romero en mars 1980. Il faut dire que celui-ci défendait la théologie de la libération, une doctrine progressiste du catholicisme.

Sur la question de la sexualité, les conseils et les méthodes autoritaires du nouveau Saint Père ne changent pas par rapport à celles du catéchisme de l’Église catholique : « Le plaisir sexuel est moralement désordonné, quand il est recherché pour lui-même, isolé des finalités de procréation et d’union. »

Sida et Église catholique : un crime

En vertu de ce dogme, l’Église catholique se permet d’attaquer toute forme de sexualité en dehors des liens sacré(ment tordu)s du mariage. Elle s’en prend pour la même raison à l’avortement, en arrivant plus ou moins à ses fins à force de lobbying [2]. Enfin elle s’en prend à la majorité des moyens de contraception, y compris le préservatif, seul moyen de protection contre de nombreuses maladies sexuellement transmissibles (MST) et notamment le virus du Sida (VIH).

Pourtant, plusieurs études américaines ont récemment montré l’inefficacité des campagnes mettant en avant l’abstinence comme moyen de contraception et de protection jusqu’au mariage. Alors que, depuis 1982, le gouvernement américain a dépensé plus de 1,5 milliards de dollars dans ce type de campagnes, celles-ci s’avèrent incapables de changer le comportement des adolescentes et des adolescents. De plus, 26 % des femmes américaines de 14 à 19 ans ont une MST et en 2006, pour la première fois en quatorze ans, le nombre d’adolescentes américaines enceintes a recommencé à croître [3].

Vu l’inefficacité de ces campagnes et dans un contexte où la pandémie du VIH continue de faire des ravages, surtout en Afrique subsaharienne où se trouvent 64 % des personnes infectées et où les trois quarts sont des femmes, l’obstination de l’Église à interdire des protections simples, peu coûteuses et efficaces, comme le préservatif, est pour le moins criminelle.

Contre les LGBT

En voulant à tout prix associer sexualité et procréation l’Église catholique doit donc s’en prendre à l’homosexualité. Concernant ce sujet, la Bible est claire : c’est une abomination (Lévitique, chapitre 18, verset 22). Ratzinger, à peine plus nuancé, maintient que « l’inclination particulière de la personne homosexuelle constitue néanmoins une tendance […] vers un comportement intrinsèquement mauvais du point de vue moral » [4].

Par ses propos, Benoit XVI légitime toutes les discriminations et violences commises envers les lesbiennes, gays, bisexuel-le-s et transexuel-le-s (LGBT) dans leur vie quotidienne, à l’école, dans leur famille, au travail, dans les espaces publics et face à l’emploi.

Rémi (AL Paris Sud)

[1Lettre aux évêques de l’Eglise catholique sur la pastorale à l’égard des personnes homosexuelles n°3, 1er octobre 1986

[2Lire AL de mai et de l’été 2008.

[3Steven Yoder, « Chastity Science Still an Oxymoron », Z Mag, mai 2008.

[4Instruction sur la liberté chrétienne et la libération n°98, 22 mars 1986.

 
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