Dockers : Un coup porté à l’un, c’est un coup porté à tous




Tous les ports de France ont les yeux rivés sur la lutte qui se joue en ce moment à Lorient. La communauté d’agglo veut licencier 10 dockers et les remplacer par des travailleurs sans statut. La fédération CGT fait monter la pression.

Quelle est la différence entre un docker et un travailleur précaire ? Le statut. Le statut de docker assure une régularité de salaire malgré l’intermittence du travail – le temps d’attente entre deux bateaux à charger ou à décharger sur le port.

Que se passe-t-il à Lorient ? Un fâcheux précédent : les autorités portuaires tentent de licencier 10 dockers pour les remplacer par des ouvriers sans statut. C’est un coup porté à l’ensemble de la profession et à ses droits.

Que se passe-t-il dans le reste du pays ? Une mobilisation solidaire, orchestrée par la CGT, pour empêcher ce mauvais coup d’affaiblir les dockers des autres ports.

Le port de pêche de Lorient était géré jusqu’en 2016 par une filiale de Veolia, la CEP. Quant aux dockers, il étaient employés pour l’allotissement du poisson par Keroman services industries (KSI), société détenue à 60 % par la CEP. Il s’agit principalement de poisson pêché par la Sca­pêche (filiale d’Intermarché). Le travail est réalisé de nuit pour que le poisson soit vendu le matin.

Mais voilà qu’en 2016, le port passe aux mains de la société d’économie mixte (SEM) Keroman, dont l’actionnaire principal est la communauté d’agglo de Lorient. La CEP se désinvestit alors de KSI et cesse de siéger au conseil d’administration. Dès lors, les jours de KSI et des dockers qu’elle emploie sont comptés. Cela se traduit par la liquidation judiciaire de KSI le 18 avril 2016 et par le licenciement économique des 10 dockers.

Deux débrayages de deux heures dans tous les ports

D’autres solutions auraient permis de garder les dockers  : la SEM aurait pu les embaucher directement, ou reprendre KSI. Mais la SEM et les élu.es de Lorient voient surtout l’opportunité de se débarrasser de travailleurs à statut. Le prétexte évoqué est d’ailleurs que le statut docker s’accorde mal avec « le fonctionnement d’un port de pêche dont les apports sont par nature aléatoires ».

Un bras de fer est donc engagé entre le syndicat CGT Ports et Docks de Lorient et la SEM. Des actions de blocage s’enchaînent, au cours desquelles les ouvriers licenciés ont pu constater leur remplacement par 20 à 25 intérimaires... Comme quoi l’activité n’est pas en baisse ! Simplement, les élu.es aiment la précarité (pour les ouvriers, pas pour eux bien sûr).

Comme les décideurs font la sourde oreille, les dockers font monter la pression avec l’appui de toute leur fédération. Le 4 mai, puis le 16 mai, des débrayages de deux heures ont touché tous les ports français. À Lorient, une manifestation a rassemblé plusieurs délégations venues des différents ports, l’interpro locale, avec la présence du secrétaire de la fédération, Tony Hautbois. On a marché au son des tambours du Havre, jusqu’à la mairie, qui a reçu une délégation. La situation n’est toujours pas réglée, la fédération laisse planer la menace d’un débrayage de tous les ports français pendant vingt-quatre heures et d’une grande manifestation des dockers à Lorient.

Robin & Ronan (AL Lorient)

 
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