Dossier Religions, racismes et mouvements sociaux : y voir clair




Un dossier coordonné par Guillaume Davranche (AL 93) et Renaud Violet (AL Alsace)

De la Scandinavie à l’Italie, en passant par la Suisse et la France, la chasse à l’« ennemi de l’intérieur » est devenue un sport à la mode dans une Europe en crise. Gouvernements en déroute et néofascistes en soif de reconnaissance rivalisent d’excitations à la haine, dans l’espoir de s’attirer la sympathie des nationaux supposés « de souche ». Et, hormis l’épisode particulièrement violent de « chasse aux gitans (et aux Roms) » du second semestre 2010 – il faut bien varier les plaisirs et les boucs émissaires – la haine autorisée s’est, depuis quinze ans, portée essentiellement contre les mêmes.

Les populations noires et/ou arabes et/ou musulmanes – tout ceci étant amalgamé dans l’esprit des nouveaux inquisiteurs – sont régulièrement soupçonnées à voix haute de n’être pas authentiquement « françaises ». Sans doute parce que, malgré leurs efforts, leurs cartes d’identité, actes de naissance, titres de séjour et autres chiffons de papier, elles ne parviennent jamais à atteindre l’aisance financière qui fasse oublier qu’elles ne sont… ni blanches, ni de culture judéo-chrétienne.

Face à cette situation, les militantes et les militants libertaires, d’extrême gauche, du mouvement social, syndical, et féministe, ont mis du temps à trouver leurs marques. Si l’antiracisme est une valeur communément partagée, toutes et tous n’ont pas immédiatement décelé les visées racistes derrière le cirque faussement laïc du gouvernement. Mais à force, les campagnes discriminatoires de l’UMP et du FN ont clarifié les
choses. Pour preuve, le terme « islamophobie », avait longtemps eu mauvaise presse dans le mouvement social parce qu’il semblait prohiber la critique d’une religion et faire le jeu de toutes ; il gagne aujourd’hui du terrain. Pour preuve, Sarkozy avait en 2004 réussi à diviser le mouvement féministe et la gauche avec la loi d’exclusion des élèves voilées des écoles ; on peut dire que, six ans plus tard, la loi de prohibition du niqab a de ce point de vue fait un quasi flop ; elle a été largement caractérisée comme un vulgaire brandon de haine.

Le risque serait à présent de s’autocensurer. De s’interdire de critiquer l’islam de peur de faire le jeu des inquisiteurs. De craindre de se faire taxer d’islamophobie – donc de racisme – parce qu’on aura moqué les dogmes faisandés, raillé les balivernes coraniques comme on raille les balivernes bibliques, évangéliques, le saint galimatias du dalaï-lama et l’ordre moral qui transpire des préceptes religieux. Tordant le bâton dans l’autre sens, quelques groupes d’extrême gauche et féministes en viendraient presque à voir dans le voile, symbole séculaire de soumission des femmes… un symbole de résistance !

Ni racisme déguisé, ni renoncement à la critique : il faut tenir la barre de la lutte contre le racisme et contre l’oppression religieuse, sans faire le jeu de l’un contre l’autre. C’est le fil rouge (et noir) de ce dossier spécial.

Au sommaire :
 Alternative libertaire : Eviter les pièges racistes sous camouflage « laïcs »
 Flash-back 2005 : caricatures danoises et psychodrame planétaire
 La laïcité mise à mort par ses célébrateurs même
 Prisons : faut-il croire en un dieu pour être réinséré ?
 Culture syndicale et culture religieuse : des interférences surmontables
 Antiterrorisme dans les aéroports : toujours l’arbitraire
 Flash-back 2003 : le forum social européen et l’affaire Tariq Ramadan
 Philosophie : Royaume céleste et appareil d’État (Proudhon, Bakounine, Griffuelhes)
 Extrême gauche : laïque ou athée ?
 Extrême droite : la nouvelle croisade
 Islamophobie : la clef d’un racisme vertueux
 Judaïsme : À l’époque des bouffeurs de rabbins
 Religions : et dans une société libertaire ?

 
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