Idées : La société face à l’industrie !




Nous entamons ici une série d’articles de réflexion sur l’industrie dans la société : à quelles conditions une industrie pourrait s’intégrer au sein d’une société écologique, au service des besoins de la population et dans le respect des impératifs du monde vivant ? Ce premier article vise à rappeler la manière dont les conséquences des pollutions ont été gérées avant la révolution industrielle.

Un polluant, même s’il n’est pas identifié comme tel, est un agent d’origine extérieure à un écosystème qui a des impacts négatifs sur tout ou partie d’un écosystème [1]. La régularisation des processus polluants est une histoire ancienne au sein des sociétés humaines. Le virage de la révolution française, qui a porté la classe capitaliste au pouvoir, nous fera par contre rentrer de plein pied dans l’ère de la pollution comme moindre mal lié au bon développement des intérêts de l’État. Mais avant cela ?

La pollution commence dès la préhistoire, avec la maîtrise du feu : « La suie trouvée sur le plafond des grottes préhistoriques est une preuve évidente de ce que les foyers entraînaient un niveau élevé de pollution du fait d’une ventilation insuffisante. » [2] La métallurgie de l’âge du bronze, puis de l’âge du fer, a marqué un tournant dans la pollution de l’environnement extérieur. Les carottages des glaciers du Groenland ont révélé un accroissement de la pollution associée à la métallurgie des Grecs, des Romains et des Chinois [3]. Mais à cette époque, la pollution était comparativement faible, et n’avait pas d’impact environnemental significatif au niveau global.

Les concentrations urbaines ont aussi constitué une source majeure de pollution tout au long de notre histoire. Les villes concentraient la présence et les déjections de nombreux hommes et de chevaux, conduisant à des pollutions de l’air et de l’eau. La combustion massive de bois et de charbon conduit également à des pollutions de l’air. Ainsi, en Angleterre, Édouard 1er édicta en 1272 une proclamation interdisant l’usage de la houille bitumineuse à Londres [4].

Quelle gestion des pollutions ?

« De nombreux documents anciens montrent que du Moyen Âge à la Révolution française, les conflits sont anciens et nombreux, mais qu’on a le plus souvent cherché à limiter ou réduire les nuisances des activités artisanales, avec des mesures (amendes, déplacements d’activité, fermetures...) et un dialogue entre les parties, ou des enquêtes de l’administration. » « Selon les documents historiques (archives juridiques, administratives), ces nuisances étaient assez fortement contrôlées et relativement maîtrisées à Paris au XIVe siècle, par la police dans le cadre de ses missions de salubrité publique. Jusqu’à cette date, la gouvernance royale ou urbaine fait appel à la concertation, à la recherche d’un équilibre pragmatique entre les contraintes économiques par la police [5]. »

La révolution de 1789 sonnera le glas de toutes les formes de régulation préexistantes : au printemps 1791 l’assemblée constituante décide la suppression des guildes, des corporations, des inspecteurs… Le temps des ingénieurs chimistes, déjà en embuscade, est arrivé. C’est ce que nous verrons dans le prochain article.

Reinette noyée (AL Aveyron) et Jacques Dubart (AL Nantes)

[1Dictionnaire du vocabulaire normalisé de l’Environnement de l’AFNOR en France.

[2« Indoor Air Pollution : A Public Health Perspective », Science, vol. 221, N°4605,‎ 1983.

[3« History of Ancient Copper Smelting Pollution During Roman and Medieval Times Recorded in Greenland Ice », Science, vol. 272, N°5259,‎ 1996.

[4David Urbinato, « London’s Historic « Pea-Soupers » », United States Environmental Protection Agency, été 1994.

[5Wikipédia, « Pollution industrielle ».

 
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