Kosovo : Encore un protectorat pour l’OTAN




Chaque fois qu’un nouveau petit État éclot dans les Balkans, c’est en adéquation avec les appétits des capitalistes de l’Ouest... et c’est au risque de mettre le feu aux poudres du pays voisin.

La proclamation d’indépendance du Kosovo est le dernier avatar des nationalismes qui déchirent la péninsule balkanique depuis le début des années 1990.

La « communauté internationale » – ainsi que les États-Unis et l’Union européenne ont pris l’habitude de s’auto-intituler – a encouragé ce processus d’indépendance. Malgré les accords de paix de 1999 qui qualifiaient le Kosovo de « partie inséparable de la Serbie », ils jugent maintenant la scission « inévitable » à cause de la tension permanente entre les Albanais et les Serbes du Kosovo. Cette position est reçue favorablement par une opinion publique qui croit que la Serbie est l’unique monstre des Balkans, au nom du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ».

Pourtant, la réalité balkanique est beaucoup moins simple. Cela fait vingt ans maintenant que les puissances occidentales redessinent la péninsule à leur guise, en traçant de nouvelles frontières avec le sang des peuples. En 1991 et 1992, les États occidentaux ont encouragé la Slovénie et la Croatie à proclamer leur indépendance, lançant un engrenage fatal.

L’Otan sème des tensions ethniques pour récolter des protectorats. Chaque fois qu’un nouveau petit État éclot dans les Balkans, sous les applaudissements des pays de l’Ouest, une grande partie de son tissu productif tombe entre les mains du capital occidental. Nous ne pouvons oublier que ce Kosovo, où les Albanais ont salué l’indépendance en agitant des drapeaux américains, est riche en or, en bauxite, en lignite et en nickel.

Drapeaux américains

Quelques kilomètres plus loin, la Macédoine résiste à la pression diplomatique de l’État grec, qui lui conteste le droit d’utiliser ce nom. Dans le même temps, le capital grec a mis la main sur les grandes mines du pays.

Le problème, c’est que la « question ethnique » est sans fin dans cette mosaïque de peuples que sont les Balkans. Depuis l’Empire ottoman, des Slaves, des Albanais, des grécophones, des Tziganes, des Turcs et des Valaques y ont toujours vécu mêlés. À tel point que, s’il est périlleux d’y distinguer des « nations », il est aisé d’y créer des revendications « ethniques ». Depuis les guerres balkaniques de 1909-1913, ce sont souvent les Églises qui servent de tambours de guerre.

En effet, il peut naître des « nations à libérer » pour chacune des variantes religieuses dont les Balkans sont truffés : catholicisme, islam, coptes, orthodoxie (elle-même divisée entre ses nuances bulgare, grecque ou serbe…). C’est sans fin.

Prochaine étape : la Macédoine ou la Bosnie ?

Le prochain chapitre est d’ailleurs déjà prêt à être écrit. Les Albanais de Tetovo, en Macédoine, ont commencé à revendiquer leur autonomie et à réveiller le projet de « Grande Albanie » incluant le Kosovo. Le gouvernement grec favorise cette revendication, pour déstabiliser le petit État macédonien. En même temps, le projet de la « Grande Albanie » est l’épouvantail dont se servent les nationalistes grecs pour chasser les immigrés albanais. Les Serbes de Bosnie cherchent aussi une raison pour faire sécession, et l’évolution du Kosovo leur donne des arguments. Personne ne peut garantir que ces nouvelles revendications ne déboucheront pas sur de nouvelles rivières de sang et de nouvelles « épurations ethniques ». Mais ceci est un détail pour les impérialistes étrangers.

À cette catastrophe permanente que constituent les nationalismes, il existe toujours une alternative : la Confédération des peuples balkaniques, que les révolutionnaires du XIXe siècle voulaient substituer à la domination ottomane. Ce projet, qui s’oppose tant au délire nationaliste qu’aux appétits impérialistes, peut plus que jamais être l’idée à même de stopper les guerres, les haines et les épurations qui menacent toujours les Balkans… Espérons donc que l’heure viendra où la colère sociale remplacera les haines nationales.

Yannis Androulidakis
(Union syndicaliste libertaire, Grèce)

 
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