Méditerranée : La mort aux portes de l’Europe




Les morts de migrants qui tentent de rejoindre l’Europe par la mer se sont multipliées ces derniers mois, mais les décideurs ne font rien pour résister au désastre. Pourtant la solution existe : la liberté de circulation.

L’annonce du sauvetage de 3 700 migrants et migrantes, au cours de la journée du 2 mai, reflète le nombre dramatique de naufragés qui ont péri dans les eaux de la Méditerranée ces dernières années. Une mer transformée en une gigantesque fosse commune qui aurait englouti plus de 20 000 personnes au cours de ces vingt dernières années, selon le HCR (Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés).

Ces drames, dénoncés depuis longtemps, n’ont cessé d’augmenter à mesure que la politique sécuritaire européenne se renforçait. Les opérations successives de Frontex ont contraint de plus en plus de migrants et migrantes à traverser la Méditerranée pour se rendre en Europe, en les détournant de routes plus sûres. L’explosion des traversées depuis la Libye répond à la raréfaction des points d’entrée et, loi du marché oblige, a généré un trafic lucratif d’être humains dont l’Europe est en grande partie responsable.

Après l’opération Mare Nostrum qui a permis le sauvetage de plus de 100 000 personnes, sans aide financière, l’Italie stoppe l’opération. Frontex prend le relais avec « Triton », une opération de surveillance constituée d’une flotte de petits navires inadaptés pour recueillir des centaines de passagers.

Il faudra encore une nouvelle tragédie – pourtant prévisible – pour que les ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur des pays de l’UE se réunissent en grande pompe le 23 avril. Mais les 800 derniers morts ne suffisent toujours pas à infléchir sa politique. Si dans l’urgence, elle triple le budget de Triton et affrète quelques navires supplémentaires pour le sauvetage en mer, elle renforce l’arsenal sécuritaire et condamne les survivants et survivantes à la rétention, au refoulement, à la reconduite à la frontière. Aucun accord d’accueil partagé des réfugié-e-s entre les 28 pays n’a vu le jour et l’Italie, comme la Grèce, devra continuer à se débrouiller seule.

Pendant que les bavardages se poursuivent pour savoir si le sauvetage en eaux territoriales est conforme aux droits internationaux, si la destruction des rafiots des passeurs est légale ou si l’accueil de quelques centaines de réfugiés par l’un des 28 pays va faire « appel d’air », hommes, femmes et enfants fuyant la misère et la guerre continuent de trouver la mort dans les eaux de la Méditerranée (2 000 depuis le début de l’année, estimation du HCR). Pour mettre fin au carnage, il faudra bien que l’Europe accepte cette donnée inéluctable et légitime qu’est la migration et qu’elle rétablisse la liberté de circulation pour tous et toutes.

Dans l’immédiat, une centaine d’associations et de syndicats se mobilisent autour du slogan « Des ponts, pas des murs » , réclamant des mesures humanitaires minimum qui n’auront cependant des chances d’être entendues qu’au prix de mobilisations nationales et internationales massives.

Chloé (AL 93)

 
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