Nécrologie : Roger Bossière, une encyclopédie vivante du mouvement ouvrier




Nous avons appris avec une grande tristesse le décès de notre camarade et ami Roger Bossière, survenu le lundi 7 août 2006.

Né en 1922, ouvrier ajusteur puis technicien, Roger a vingt ans lorsqu’il s’engage dans la lutte révolutionnaire, en pleine occupation allemande. On mesure sans doute mal à quel point, dans un tel contexte, il pouvait s’agir d’une démarche à contre-courant. Au sein de la résistance, les révolutionnaires sont en effet totalement marginalisé-e-s par des gaullistes et des stalinien-ne-s qui luttent contre l’occupant non par antifascisme, mais par patriotisme français - d’où l’ignoble slogan “À chacun son Boche” lancé par le PCF en 1944. Seuls quelques groupes trotskystes, libertaires ou “ultra-gauche” restèrent alors fidèles aux valeurs de l’internationalisme.

C’est justement à l’ultra-gauche que Roger Bossière fait ses premiers pas, en adhérant au Groupe révolutionnaire prolétarien (GRP) dans lequel il rencontre Maximilien Rubel qui n’est pas encore le marxologue de réputation mondiale qu’il deviendra par la suite. Le GRP publie un bulletin clandestin, Le Réveil prolétarien, qui plaide pour la transformation de la guerre impérialiste en guerre révolutionnaire, afin de mettre en place une « république internationale des conseils ouvriers ».

Après-guerre il s’engage dans le mouvement des auberges de jeunesse, qui à l’époque est un véritable courant de contre-culture, qui fournira de nombreux et nombreuses militantes anticapitalistes. Parallèlement et jusque dans les années 60, Roger Bossière appartient à l’ultra-gauche, cette galaxie de groupes microscopiques si assoiffés d’analyses théoriques définitives qu’ils s’interdisent généralement toute pratique.

Dans les années 60, toujours avec Maximilien Rubel et Ngo Van, il participera au Groupe communiste de conseils, qui traduit et diffuse en France les textes du théoricien conseilliste Anton Pannekoek.

Par la suite, il collaborera à la revue Spartacus de René Lefeuvre et rejoindra la revue syndicaliste révolutionnaire La Révolution prolétarienne, animée par Roger Hagnauer et Maurice Chambelland, qui poursuivent l’œuvre de Pierre Monatte. Roger Bossière sera finalement membre d’Alternative libertaire de 1991 à 2001. « C’était un puits de science, une encyclopédie vivante du mouvement ouvrier », selon son ami Georges Fontenis, ex-secrétaire général de la Fédération anarchiste dans les années 40-50 et toujours membre d’AL en Touraine.

Depuis longtemps Roger vivait en Normandie avec sa compagne Madeleine. Toutes nos pensées vont à elle et à sa famille.

Guillaume Davranche (AL Paris-Sud)

 
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