Non mixité : Un outil d’émancipation




Non-mixité : deux petits mots qui donnent lieu à de grands débats. Celles qui en sont partisanes se voient très vite taxées de vilaines féministes séparatistes. Pourtant, c’est un outil politique émancipateur, essentiel dans le processus de conscientisation propre aux luttes féministes.

En tant que membres de la catégorie sociale «  femmes  », on subit au quotidien tout un tas d’agressions  : sifflements, réflexions sexistes, pubs, mains aux fesses, plaisanteries machistes... Nous avons également toutes été confrontées plus ou moins directement aux violences sexuelles, à travers notre vécu personnel ou celui de proches. Pouvoir dire ces violences, c’est pouvoir en prendre conscience et surtout pouvoir les politiser : ce ne sont pas de simples accidents de parcours individuels mais bien des actes sociaux, tolérés et encouragés par le système patriarcal. C’est en ayant conscience de cela que nous pouvons donner une réponse collective et politique à tous les actes de violence sexiste que nous vivons quotidiennement.

Une parole plus libre

Il est plus facile d’aborder ces questions en non-mixité, notamment parce que la présence d’hommes peut inciter certaines à minimiser les violences vécues, par crainte d’avoir l’air accusatrices à l’égard de leurs camarades masculins. D’ailleurs, lorsque des hommes assistent à ce genre d’échanges, il n’est pas rare qu’ils parasitent le débat en affirmant que eux, ils sont pour l’égalité de genre et qu’ils n’ont jamais, au grand jamais, de comportements sexistes. De plus, on le sait, dans des espaces mixtes la parole a tendance à être appropriée par les hommes, qui se sentent souvent plus légitimes pour parler, même de sujets qui ne les concernent pas directement. De la même manière qu’eux devraient faire attention à ne pas confisquer la parole aux femmes, nous devons prendre confiance en nous pour nous sentir tout autant légitimes qu’eux à nous exprimer en public. Pour certaines, cela passe notamment par une première prise de parole dans un cadre non-mixte, qui est plus facile et souvent moins angoissante.

Se retrouver entre nous pour discuter féminisme, patriarcat, mode d’action, etc., ce n’est pas si anodin que ça puisse paraître  : des groupes de femmes qui font de la politique, d’elles-mêmes, qui s’auto organisent, c’est encore rare, et ce même dans les milieux politisés.

Une histoire de politique

D’autant plus que si la non-mixité féminine est souvent contestée, celle des hommes qui se produit souvent de fait, notamment dans plusieurs groupes militants de gauche, n’est, elle, pas sujette à caution. On rétorquera que cette non-mixité masculine n’est pas intentionnelle, contrairement à celles des femmes. C’est bien là que le bât blesse  : les femmes s’auto excluent de certains groupes politiques trop virilistes où elles ne trouvent pas leur place. Ainsi même si elle n’est pas revendiquée, la non-mixité masculine est créée par des hommes qui adoptent des attitudes peu propices à l’intégration de femmes dans leurs groupes (plaisanteries machistes, concours de virilité...). En tant que féministes, nous affirmons que la non-mixité est un outil politique essentiel pour construire une lutte féministe autonome et qui nous permette de nous affranchir réellement du patriarcat.

« La non-mixité, c’est excluant et discriminant »

La non-mixité c’est avant tout un entre-soi plutôt qu’une pratique excluante et discriminante. Les hommes ne sont pas discriminés  : ils ne sont pas exclus en raison de leur sexe biologique, mais de la place qu’ils occupent dans le système patriarcal, à savoir celle de dominant. Cette place, même s’ils n’en profitent pas intentionnellement, leur apporte tout de même des bénéfices matériels, sociaux et politiques incontestables (ils ne sont pas violés, brimés, exclus, tabassés, rabaissés... et tant mieux  !).

Il s’agit donc avant tout de se retrouver dans un cadre non-mixte entre personnes opprimées par un même système (le patriarcat) afin de se donner les outils de combattre la domination masculine. De plus, la tenue de réunions non-mixtes n’empêche pas de discuter de ces questions également dans un cadre mixte.

Auréline (AL Toulouse)

 
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