Précaires de la fonction publique : L’Éducation nationale devant les prud’hommes




Depuis l’été dernier, des précaires de l’éducation nationale s’organisent contre leur employeur qui ne remplit aucune de ses obligations. On redresse la tête, on s’organise et on fait marcher la solidarité interprofessionnelle. La lutte ne fait que commencer mais a déjà permis à de nombreux salarié-e-s de regagner leur dignité.

En juin dernier, plusieurs centaines d’EVS et d’AVS [1] en contrats unique d’insertion (Cui) apprennent qu’elles [2] ne seront pas renouvelées en septembre et/ou qu’elles devront retourner à la case départ Pôle emploi car en fin de contrat. Il se trouve par ailleurs que l’Education nationale, dans le cadre du Cui, a l’obligation de leur proposer et de leur financer une formation qualifiante de leur choix. Bien entendu, l’Education nationale, comme de nombreux employeurs, ne se soucie guère de ses précaires. On prend, on essore et on jette. Et si possible dans l’indifférence des salarié-e-s titulaires et sans faire de vagues.

[*Faire vivre l’outil interprofessionnel*]

C’était sans compter sur le ras l’bol de plusieurs dizaines d’entre elles qui décident d’agir. Dès juin, elles se réunissent en assemblée générale (AG). D’AG en AG, on atteint une cinquantaine d’EVS/AVS qui se constituent en collectif de lutte. Une montée au rectorat est organisée le 7 juillet réunissant une centaine d’EVS/AVS, de profs, de militantes et militants de l’interprofessionnel CGT et Solidaires : réponses évasives du rectorat ; aucune réponse de la préfecture. S’ensuit la constitution de dossiers pour assigner l’Education nationale aux prud’hommes afin de la faire condamner pour non respect de ses obligations contractuelles. Trente-quatre dossiers sont constitués, répartis entre la CGT et Solidaires. Parallèlement à cette démarche prud’homale, chaque dépôt des dossiers à Lorient et à Vannes fait l’objet d’une manifestation d’une centaine de personnes dénonçant le système de précarité solidement installé dans la fonction publique d’Etat comme ailleurs. Le 10 novembre prochain, se tiendra la première audience au conseil des prud’hommes de Lorient. Une marche pour la dignité et la justice sociale est à nouveau prévue [3].

[*Découvrir l’utilité de la lutte*]

Cette lutte a déjà permis à de nombreuses salariées de se déculpabiliser des discours tenus par l’administration à leur égard – « on vous donne du travail déjà ! » – de retourner leurs révoltes contre leur employeur, de prendre conscience qu’elles sont des milliers en France dans cette situation, et pour une grande partie d’entre elles de se syndiquer et de découvrir l’utilité de la lutte. Elle a aussi permis de renouer avec un syndicalisme qui organise et propose une stratégie de luttes aux plus précaires, et de faire vivre l’outil interprofessionnel syndical au travers de la participation aux manifs d’autres travailleuses et travailleurs syndiqués. C’est un des prolongements positif de la lutte de l’automne dernier : le retour de réflexes de solidarité entre toutes les catégories de travailleurs et travailleuses. Côté enseignant, il reste encore beaucoup de chemin à faire tant leur participation fut décevante. Nous y reviendrons.

Rémi Ramon (AL Lorient)

[1EVS : employé de vie scolaire dont la tâche principale est l’assistance administrative à la direction des écoles ; AVS : auxiliaire de vie scolaire accompagnant les élèves handicapés dans le cadre de la loi de 2005.

[2Le féminin est employé car ces emplois sont occupés à 99% par des femmes (comme par hasard).

[3Rendez-vous à 13h30, boulevard Cosmao Dumanoir à Lorient face à la maison des syndicats

 
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