« sauvetage » : L’État est décidé à nous faire payer




360 milliards d’euros, c’est la somme que compte allouer Sarkozy au « plan anti-crise » annoncé le 13 octobre. C’est également un peu plus que le budget total de l’État français pour 2008. Rien que ça !

Ce sont au total 1 700 milliards d’euros qui vont être alloués par les gouvernements européens pour sortir de la crise financière. Les 360 milliards annoncés par Sarkozy vont se décomposer en deux parties. Une première va servir à garantir les prêts entre banques contractés avant la fin 2009, à hauteur de 320 milliards pendant cinq ans.

En fait, cet argent n’est pas réellement dépensé tant que les banques ne s’écroulent pas. Ce qui va réellement être dépensé par l’État, ce sont les 40 milliards restants, soit sous la forme d’une prise de participation au capital de certaines banques, soit sous la forme d’un prêt. Les banques sont incitées à se servir de cet argent, quelle que soit leur situation, mais pour en bénéficier, elles devront respecter une charte « éthique », par exemple en restreignant les parachutes dorés. C’est la moindre des choses !

Euphorie boursière

Avant cette annonce, la méfiance était telle que les banques ne se prêtaient plus d’argent entre elles. Or la confiance est un rouage essentiel de la finance, c’est elle qui fixe les prix. Ainsi, des établissements traversant parfois simplement une mauvaise passe peuvent se retrouver en faillite à cause de soupçons sur leur capacité à rembourser leurs emprunts. Du coup les banques rechignent à prêter aux particuliers et aux entreprises, amorçant ainsi une crise économique.

Les annonces des dirigeants européens sont donc adaptées pour relancer la machine à spéculer avec son cortège de produits financiers foireux et de bulles spéculatives. Dès le lendemain de ces annonces, les bourses mondiales repartaient toutes en flèche : pourquoi les apprentis sorciers de la finance se gêneraient-ils, alors que les États couvrent, par avance, leurs folies ? Le « pire de la crise est passé »… Peut-être. Jusqu’à ce que la prochaine bulle spéculative explose.

D’où sort cet argent ?

Il y a quelques mois à peine, Sarkozy nous assénait : « Les caisses sont vides. » Quand il s’agit du soi-disant trou de la Sécu, parfois estimé à 9 milliards d’euros [1], les caisses sont vides et l’État instaure des franchises médicales. Quand il veut privatiser la Poste, l’État prétend qu’il faut qu’elle génère 3 milliards de bénéfices supplémentaires.

Ces sommes sont dérisoires en comparaison des 360 milliards annoncés pour secourir les banques. Mais alors, d’où sortent-ils ?

Sur un point au moins, le gouvernement ne ment pas : cet argent n’est pas pris sur un autre budget. Cet argent, l’État l’emprunte… aux banques ! L’État joue ainsi le rôle d’intermédiaire solvable entre les banques, un intermédiaire capable de rembourser la dette qu’une banque en faillite ne pourrait honorer.

Là où le gouvernement ment effrontément, c’est quand Christine Lagarde prétend, le 13 octobre, que les 40 milliards investis ou prêtés aux banques vont rapporter de l’argent. Pour aider des banques en difficulté, l’État rachète à bon prix des actions qui ne valent plus rien. Et s’il investit dans des banques rentables, gageons qu’il reprivatisera rapidement la poule aux œufs d’or pour que ses amis capitalistes en profitent, comme il l’a fait par le passé avec le Crédit agricole et la Banque postale.

Et maintenant, la récession

Le bilan de tout cela, c’est que la dette de l’État va gonfler. Et qui va la rembourser ? Nous, bien sûr ! Le remboursement de la dette publique coûte déjà plus de 100 milliards d’euros par an, on n’est plus à ça près. Quelques services publics saccagés, des salaires bloqués, des milliers de postes de fonctionnaires supprimés, et on s’y retrouvera. C’est le calcul fait par le gouvernement.

La finance est sauvée parce que la crise s’est déportée sur l’économie réelle, grâce à l’intervention de l’État. Maintenant, c’est au tour des entreprises d’être en difficulté (lire pages précédentes). Les spéculateurs vont vouloir regonfler la valeur de leurs actions en bloquant les salaires, en délocalisant, en licenciant. Et l’attention que l’État portera aux travailleuses et aux travailleurs ne sera sûrement pas celle qu’il a prodiguée aux capitalistes.

Grégoire Mariman (AL Paris-Sud)

[1Lire l’argumentaire « Pour toutes et tous, Droit à la santé ! » sur www.alternativelibertaire.org.

 
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