A Contre Courant : Ils se foutent de notre gueule !




Chaque mois, le mensuel Alternative libertaire reproduit l’édito de la revue alsacienne À Contre Courant, qui de son côté reproduit l’édito d’AL. Pour contacter ces camarades : ACC, BP 2123, 68060 Mulhouse Cedex.


Qui ça ? Les patrons ? Sûrement ! Le gouvernement ? Bien sûr aussi. Mais ceux que nous visons aujourd’hui, ce sont “ nos ” dirigeants syndicaux.

Le 4 octobre dernier, ils ont une nouvelle fois organisé une “ journée d’action et de mobilisation ” contre la politique gouvernementale. Relativement bien suivie par les salariés, à en juger par le nombre de grévistes et de manifestants. Et qui, comme les précédentes, n’a abouti à rien. Si ce n’est à démontrer, une fois de plus, que la répétition de ce genre de journées ne peut, par son inefficacité, que conduire à la démobilisation progressive des salariés et, en définitive, à leur inaction. Du moins tant qu’on leur proposera d’agir et de se mobiliser dans de pareilles formes.

Au demeurant, on peut se demander si ce n’est pas là le but non avoué, parce qu’évidemment inavouable de cette forme d’action. Epuiser les travailleurs en de vaines "journées de mobilisation" pour émousser leur combativité. C’est là très exactement la tactique qu’ont utilisée les organisations syndicales, CGT en tête, au printemps 2003 pour dévoyer la mobilisation populaire contre le projet de réforme des retraites. Avec le "succès" que l’on sait.

Si les dirigeants syndicaux organisent ainsi la démobilisation des travailleurs, c’est qu’ils craignent par-dessus tout les effets potentiels d’une telle mobilisation qui risquerait de les déborder et de les emporter. Or, en bons gestionnaires du rapport salarial qu’ils sont, ils se doivent de tenir leurs troupes pour asseoir leur crédibilité auprès des autres "partenaires sociaux" que sont le patronat et leur gouvernement. Pas question par conséquent de laisser trop de mou dans la bride sur le cou des travailleurs. Cependant, en agissant de la sorte, ils scient progressivement la branche sur laquelle ils sont assis. Car leur crédibilité suppose encore deux autres conditions.

D’une part, de pouvoir mobiliser suffisamment les travailleurs pour pouvoir inquiéter leurs "partenaires" dans la parodie de lutte de classes qu’ils organisent. C’est d’ailleurs toute la difficulté de leur jeu tactique dans cette pièce : en faire assez (pour inquiéter le patronat et le gouvernement et les contraindre à négocier) mais ne pas en faire trop (sinon la base risque de se lancer dans "l’aventure", laquelle, qui sait, risque de mener jusqu’à la révolution). Tandis que, d’autre part, cette même crédibilité suppose que les travailleurs se mobilisent dans les formes voulues par eux, et dans aucune autre. Au contraire, si ces derniers ne font plus confiance aux dirigeants des appareils, c’est le crédit de ces dirigeants auprès du patronat et du gouvernement qui s’étiole. Or nous avons vu que la stérilité grandissante des formes dans lesquelles ils cherchent à mobiliser comportent le risque de démobiliser petit à petit les ouvriers. Ou de les pousser tant à radicaliser leurs objectifs de lutte que d’autonomiser leurs formes de lutte.

Alors, Thibault, Mailly, Chérèque, Ollive, Aschiéri et consorts, continuez à vous foutre de notre gueule ! Et dépêchez-vous d’en profiter ! Car il se pourrait bien que vous n’en profitiez plus très longtemps !

 
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