Dico anticapitaliste : Qu’est-ce que le « développement autonome » ?




Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible par Jacques Dubart.


Adam Smith écrivait en 1776 dans sa Recherche sur la nature et les causes de la richesse des Nations qu’il était prudent « de ne jamais essayer de faire chez soi la chose qui coûtera moins à acheter qu’à faire ». Tout faux. Aujourd’hui on voit les dégâts écologiques et sociaux qu’a engendré cette idée.

Qui peut nier que l’autonomie alimentaire, énergétique, productive, est de loin préférable, pour une population, à la dépendance aux importations de l’étranger qui sont, la plupart du temps, un instrument de domination impérialiste ?

Le développement autonome donne la priorité aux ressources et à la production locales, qui sont les plus rationnelles au point de vue économique et écologique.

En avril 2008, conséquence d’une frénésie spéculative sur les produits agricoles, des émeutes de la faim ont secoué l’Égypte, le Maroc, l’Indonésie, les Philippines, Haïti, le Nigeria, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Mozambique, la Mauritanie, le Sénégal, le Burkina Faso... Alors que certains de ces pays ont une forte production agricole… consacrée à l’exportation vers l’Occident !

Dans les années difficiles qui s’annoncent, liées à la crise climatique, l’autonomie des pays du Sud est vitale. Il faut casser les règles du commerce international qui obligent les pays du Sud à sacrifier leur autonomie alimentaire au nom du « marché libre ». Comme
l’énonce l’internationale paysanne Via Campesina, la souveraineté alimentaire c’est « le droit des populations […] à définir leur politique agricole et alimentaire, sans dumping vis à vis des pays tiers ».

Pour cela, les paysans doivent avoir accès à la terre, à l’eau, aux semences. Les techniques agricoles doivent être transformées. Les intrants chimiques doivent être abandonnés et le recyclage des déchets systématisé pour produire engrais et biogaz.

Aussi le développement autonome n’est pas une « autre forme » de la croissance économique. Son objectif n’est pas de produire des marchandises destinées au commerce international, mais de satisfaire les besoins réels des populations, nourriture, santé, école, logement, transport, communication, culture...

Les minorités privilégiées de chaque région du monde s’opposeront toujours à de tels objectifs car leur intérêt est dans le contrôle des bénéfices du commerce international. Un développement autonome ne se réalisera pas sans de profondes transformations sociales, replaçant les moyens de production et de distribution entre les mains des productrices et des producteurs eux-mêmes.

 
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