dossier du n° de mai

Grenoble : Quartiers populaires : Dans les cités, rien n’a changé




Rencontre avec un militant de Grenoble, afin de faire le point sur la politique municipale dans les quartiers populaires.

Nous avons interrogé un militant du Front uni des immigrations et des quartiers populaires (FUIQP) fondé par Saïd Bouamama en 2015 suite au non-lieu dans l’affaire Bouna et Zyed. Privilégiant une analyse de classe et de « race » en tant que catégorie sociologiquement construite, la principale action de ce collectif à Grenobleest actuellement de sensibiliser aux manifestations contre la loi travail.

Concernant la démocratisation de la vie politique dans les quartiers, axe proclamé du programme de Piolle, on constate toutefois peu d’évolution, les unions de quartiers étant peu dynamiques. «  C’est les mêmes mecs depuis trente ans, qui ne font pas grand-chose, à la Villeneuve l’union des quartiers n’est pas représentative, y a des gens qui sont même pas du quartier et qui voient toute cette violence de loin, quand ils la voient. »

La mairie subventionne les actions qui lui conviennent et ne risquent pas de la mettre en danger : des associations non gérées par les habitants et habitantes, et dont les actions ne dépassent pas le cadre du divertissement. « Le club de foot a brûlé, une semaine après le théâtre a brûlé aussi : [si] le théâtre est en reconstruction, rien [n’est prévu] pour le club de foot de Teissere [qui] a fermé. Y avait aucune subvention, alors qu’il avait 40 ans. » Pour notre interlocuteur, « les dirigeants ont peur des “islamistes”. Dès qu’ils voient des rassemblement d’Arabes, ils flippent ».

Finalement, seules les associations de quartiers composées d’associatifs proches de la mairie reçoivent des subventions, craignant toute initiative dont elle n’a pas le contrôle et où des personnes représentant réellement le quartier pourraient se retrouver et s’investir.


En supplément a cet article, nous intégrons ici la vidéo du documentaire "Villeneuve, l’Utopie malgré tout", qui revient sur le traitement médiatique et politique de ce quartier populaire majeur dans l’histoire passé et présente de Grenoble et son agglomération.


La Villeneuve, l’utopie malgré tout par latelelibre


Précarité et ambiance sécuritaire

La volonté de réintroduire la mixité sociale et des fonds pour l’éducation des jeunes dans les quartiers n’ont pas dépassé le stade de programme. Les écoles et collèges publics sont délaissés pour des établissements privés, creusant l’écart entre les institutions scolaires des quartiers et du centre-ville. « Les quartiers se ghettoïsent parce que ceux qui ont les moyens partent. (…) On nous dit qu’on reste entre nous, mais on n’a pas le choix, y a plus que nous. Lutter contre la ghettoïsation, on veut toujours que ce soit dans un sens. » Accentuant cet enfermement, « rien n’est fait pour tout ce qui est extra-scolaire, ils évitent de faire sortir les gamins du quartiers, les profs n’arrivent pas à les maîtriser ».

Problème majeur dans les quartiers, le rapport à la police et à la répression. Le programme souhaitait amorcer un rapprochement entre les habitants et la police, recréer du dialogue, en enlevant notamment les caméras. « Concernant la police y a pas d’évolution dans le bon sens. C’est un problème global de ghettoïsation, de pauvreté et de racisme. Tant qu’il y aura ce genre de problème, y aura des problèmes avec la police. » La violence de la police apparaît ainsi institutionnelle, un outil de contrôle social et colonial des quartiers populaires.

Le problème apparaît trop profond et systémique pour être réglé par une seule équipe municipale. C’est toute l’organisation politique, sociale et économique de la société capitaliste et étatiste qui doit être remise en question. Vouloir changer les choses avec une mairie, quelle que soit sa couleur, est inopérant. « Vis-à-vis des politiques ça change pas, ils sont vus comme des gens qui décident, ça reste des gens qui ont le pouvoir. » Deux ans après l’élection, rien n’a changé dans la vie des quartiers grenoblois, la précarité et l’ambiance sécuritaire n’ayant qu’accru l’exclusion, comme partout en France.

AL Grenoble

— image : cc ici villeneuve


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