Identitaires : la ville rose saigne




Dans la nuit du 31 mars au 1er avril à Toulouse, un sans-papiers chilien a été tabassé par des fascistes. Après un pronostic vital engagé, Andrès est maintenant hors de danger. Cette attaque est le point d’orgue d’une montée en puissance de l’extrême-droite militante toulousaine.

L’extrême-droite est en recomposition depuis quelques années à Toulouse. En cause : l’implantation du Bloc identitaire (BI) qui semble en voie de rassembler un paysage jusque là divisé en une mosaïque de groupes plus ou moins folkloriques (Égalité & Réconciliation, Organisation socialiste et révolutionnaire européenne, Mouvement d’action social, etc.).

Connu principalement par ses coups de pub et par son obsession anti-Islam, le Bloc multiplie depuis quelques années les actions sur la ville rose. Son assise – principalement issue de l’Union des étudiants toulousains indépendants et libres (Util), une association étudiante d’extrême droite, aujourd’hui dissoute – lui a permis d’effectuer des actions de plus en plus visibles et violentes. On passe ainsi d’un petit apéro saucisson-pinard à un défilé chaque 9 juin en mémoire de la bataille de Toulouse de 721, en passant par des violences contre tout ce qui va à l’encontre de leur vision réactionnaire de la société (soirée LGBT, concert du groupe Zep, local de la CNT, etc.). Son implantation s’est concrétisée avec l’ouverture récente d’un local pseudo-occitaniste de près de 100 m2 situé ironiquement au 36 allée de Barcelone.

[*La riposte antifasciste*]

Toulouse a la chance de bénéficier d’un réseau militant dense qui organise la riposte à chaque provocation. Un collectif s’est monté, l’Union antifasciste toulousaine qui axe son travail sur la dénonciation de l’extrême droite militante [1]. Il est notamment à l’initiative d’une campagne d’information qui a culminé avec une manifestation demandant la fermeture du local du BI. Celle-ci, organisée conjointement avec d’autres organisations [2] a regroupé 300 personnes.

Cette campagne porte ses fruits puisqu’elle a permis par exemple que les organisateurs de la manifestation occitane du 31 mars qui a réuni près de 30 000 personnes ne permettent pas au Bloc d’y tenir cortège. L’exaspération contre les fachos est telle que même Pierre Cohen, le maire socialiste, s’est permis des déclarations offensives ce jour-là : « Tout ce qui est nationaliste, Front national ou autre, je considère que réduire leur présence voire l’éradiquer, c’est important. Il y a deux moyens : par la loi et le rapport de force physique, qui montrent que l’on est très majoritairement contre, mais aussi par le combat idéologique. ».

Dans la nuit qui a suivi, les militants du Bloc qui rôdaient encore ont agressé un sans-papiers chilien de 37 ans, Andrès. Ses jours ne sont plus en danger, mais un comité de soutien a été créé autour de lui, avec pour objectif de sensibiliser sur les questions de racisme et de xénophobie [3].

Mais ces réactions restent pour l’instant inefficaces à enrayer le développement d’une extrême-droite à l’offensive. En marge du FN qui se développe dans les zones périurbaines de l’agglomération au point de faire près de 30 % des voix dans certains villages de la grande banlieue (qui sont autant de déserts militants et, de plus en plus, sociaux), mais qui manque de cadres et reste faible en centre-ville, une extrême droite plus activiste et donc plus urbaine tend à prendre de l’importance.

[*Quelles perspectives ?*]

Il est tentant pour les antifascistes de privilégier le combat contre telle ou telle organisation. Mais la progression conjointe de l’extrême droite militante et du FN dans des milieux différents démontre que l’un comme l’autre sont deux manifestations complémentaires d’un même phénomène : la progression des idées xénophobes à la faveur de la crise économique et du soutien dont elles bénéficient de la part d’une partie des médias et de la bourgeoisie.

Dany (AL Toulouse)

[1unionantifascistetoulousaine.wordpress.com

[2AL, CNT, Coup Pour Coup, Déchoukaj, Libertat, Sud-Etudiant, OCML-VP, Aget-FSE.

 
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