La critique cinéma de Cluny : « My Own Love Song »




Pour son premier film américain, le réalisateur de La Môme signe un road movie inégal.

Le cinéma américain a toujours su attirer à lui des réalisateurs de tous les pays. D’abord terre de refuge pour les Lubitsch, Curtiz ou Von Stroheim, Hollywood est devenu pour des Paul Verhoven, Sam Mendes, Ang Lee ou John Woo une garantie d’accès à un public mondial. Curieusement, peu de réalisateurs français ont tenté l’aventure américaine. Barrage de la langue ou incompatibilité génétique du cinéma d’auteur avec le fonctionnement des majors, les rares réussites commerciales sont à mettre au crédit de réalisateurs mineurs qui ont mis toute leur énergie à faire plus américain que le modèle, comme Jean-François Richet ou Pierre Morel. Toujours est-il, qu’auréolé de sa réputation toute neuve de faiseur d’oscar avec La Môme, Olivier Dahan est parvenu à attirer des habitués des Academy Awards tels que Forest Whitaker, Renée Zellweger et Nick Nolte.

On peut comprendre ce qui a séduit celui qui a reçu la statuette pour son incarnation de Idi Amin Dada dans Le Dernier Roi d’Ecosse dans ce road movie mettant aux prises deux éclopées de la vie, un ex-pompier schizophrène et une ancienne chanteuse de rock devenue paraplégique suite à un accident de la route.

La (bonne) surprise de ce film vient de la relative sobriété de sa réalisation ; Olivier Dahan n’a pas cherché à en mettre plein la vue avec caméra virevoltante et effets spéciaux hype, bien au contraire. Il a ainsi choisi de filmer ses personnages en plan serré, pour évoquer l’enfermement de Jane dans son corps et celui de Joey dans son crâne, et de privilégier le hors champ, comme dans la scène où Jane reçoit les applaudissements, là où tout bon cinéaste américain aurait insisté à coup de ralentis sur la standing ovation.

Il a eu aussi le culot de filmer la poursuite en voiture la moins compréhensible et la plus intériorisée de l’histoire du cinéma en ayant recours à un split screen psychédélique, et il a truffé son récit de petites parenthèses narratives élégantes, comme cette histoire du bluesman noir qui rencontra le diable filmé en rouge et bleu comme dans Le Petit Poucet dans une ambiance qui rappelle la fuite en bateau de La Nuit du Chasseur, ou cet échange muet et burlesque entre Joey et Billie derrière une vitre dépolie.

Malheureusement, il n’a pas fait preuve de la même sobriété dans l’écriture du scénario, et le récit toujours sur le fil du rasoir du mélo larmoyant alterne petits moments de grâce et lourdes fautes de goût. À signaler, la musique du film signée Bob Dylan.

  • My Own Love Song, de Olivier Dahan, avec Renée Zellweger, Forest Whitaker, 2008. Durée : 1 h 45. Sortie le 7 avril.

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