Le dico anti-patriarcal : Qu’est-ce que « les études de genre » ?




Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible, par Irène.

La notion sociologique de « genre » émerge
progressivement dans les années 1970, en particulier dans les travaux de la sociologue britannique Ann Oakley. Ce terme avait déjà été utilisé dès les années 1950 par un sexologue qui s’intéressait au cas des enfants intersexes. La notion de genre désigne à partir de là l’écart entre le sexe biologique et le rôle social féminin ou masculin.

Le terme «  genre  » prend une place de plus en plus déterminante dans les « women studies » (études sur les femmes). Avec la constitution de la théorie queer, en particulier par Judith Butler, la notion de genre déborde le cadre des études sur les femmes. Les gender studies portent sur la construction sociale des rôles féminin et masculin non seulement dans les relations entre hommes et femmes, mais également par exemple dans les milieux lesbien, gay, transexuel et intersexe (LGBTI). Les études de genre acquièrent une place académique outre-Atlantique sous l’effet d’une prise en compte de l’histoire et de la vie des minorités. Il s’agit de remettre en question une vision des savoirs académiques centrée uniquement sur le point de vue majoritaire des dominants. C’est sous l’effet du modèle américain que la notion de genre et les études de genre gagnent une légitimité en France en sociologie ou en philosophie par exemple.

En réalité, le mouvement intellectuel entre les États-Unis et la France est plus complexe. En effet, c’est chez des intellectuel-le-s français homosexuels tels que Monique Wittig et Michel Foucault que Judith Butler puise une partie de ses références. En outre, la réception des gender studies s’effectue en France dans un contexte où il existe des études féministes qui s’étaient développées à partir des années 1970.

Cependant, la notion de genre est ambiguë car son sens varie en fonction des auteures. En effet, elle peut renvoyer chez certaines à une construction sociale uniquement d’ordre normative et culturelle. C’est le cas dans les théories queer. Néanmoins, la notion de genre est reprise chez les auteures féministes matérialistes comme Christine Delphy en devenant synonyme de rapports sociaux de sexe. Le genre n’est pas alors uniquement une construction culturelle, mais il trouve sa base dans des rapports sociaux économiques. La notion de genre peut certes être utilisée par opposition au sexe. Mais certaines auteures considèrent que la distinction entre sexe et genre est discutable. Les divisions sexuelles sont alors considérées non pas comme des catégories réelles qui existeraient dans la nature, mais comme socialement construites. La notion de genre rejoint alors celle de «  sexe social  » présente chez les auteures féministes matérialistes.

Pour aller plus loin : Pfefferkorn Roland, Genre et rapports sociaux de sexe, Editions Page 2, 2012.

 
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