Pouvoir d’achat : Les pétroliers nous pompent




La hausse des prix du pétrole est structurelle mais la flambée actuelle tient davantage aux profits des multinationales. La solution à la crise serait un changement global du modèle économique.

Les mouvements de protestation contre le prix de l’énergie se multiplient : pécheurs, transporteurs. L’Indecosa-CGT demande la baisse des taxes sur les produits pétroliers (14 mai 2008).

Flambée ? Quelle flambée ?

En premier lieu, il convient de relativiser la hausse du pétrole et de voir un peu plus loin.

La consommation de pétrole en France a baissé de 25 % en 30 ans (source : Insee). Or en 2006, le pétrole importé est moins cher qu’en 1981-1982 (source : Insee) ! Les compagnies pétrolières ont cherché à compenser le manque à gagner. En réalité, elles l’ont sur-compensé en augmentant continuellement leurs profits, indépendamment de l’évolution de la consommation.

Le cours du brut est instable. Pourtant, entre 1990 et 2004, il est resté relativement constant, du moins en euros. La baisse du dollar sur cette période a lissé les cours du brut, pour ce qui concerne l’Europe. Le prix du brut en euros est même descendu en 1998 à la moitié de son cours de 1990.

Or, dans le même temps le prix à la pompe a augmenté de manière continue d’environ 4,5 % par an. En 2004, le gazole à la pompe coûtait 63 % de plus qu’en 1990, alors que le brut n’avait augmenté que de 6 % sur la même période, et le Smic de 56 %. Le « poids » de l’essence sur le « pouvoir d’achat » (voir Alternative libertaire n°172, avril 2008, sur le « pouvoir d’achat ») ne date pas d’hier : c’est une réalité voulue, décidée par les pétroliers, et sans rapport avec le cours du brut ! Pendant 15 ans, les compagnies pétrolières et l’État se sont gavés sur le dos des consommatrices et consommateurs, poussés à la consommation par une politique d’aménagement du territoire centrée sur la bagnole.

Depuis 2004, le cours du pétrole brut est à la hausse. Cette augmentation est désormais plus rapide que celle des salaires. Elle est répercutée sur les prix à la pompe, et même amplifiée. En 2007, le gazole coûtait environ 1,10 euros le litre ; en 2008, 1,50 euros : 36 % d’augmentation (source : ministère de l’économie). En 2007, le cours moyen du brut était de 53 euros le baril ; en 2008, 67 euros (source : ministère de l’Industrie) : 26 % d’augmentation. Devinez où sont passés les 10 points d’écart... Les compagnies pétrolières maintiennent ainsi le taux de croissance auquel les actionnaires se sont habitués lorsque le prix du brut stagnait.

En résumé : on répercute les hausses, jamais les baisses.

Pour un pétrole plus cher !

Pour autant, de manière objective, on peut considérer que le pétrole, même au prix actuel, est quasiment donné.

Le pétrole est non renouvelable, disponible en quantité limitée. Les alternatives, dont les agrocarburants, sont inadaptées à un remplacement de masse à utilisation constante, voire dangereuses (voir Alternative libertaire n°168, décembre 2007). La rareté réelle du pétrole justifierait, dans une économie capitaliste, un coût autrement plus élevé que le coût actuel.

Surtout, l’impact environnemental et écologique du pétrole est tel qu’on ne peut que réclamer une hausse massive du prix du pétrole. Une condition nécessaire est bien entendu que la richesse dégagée soit affectée à gérer les conséquences de l’utilisation massive du pétrole et à rechercher des alternatives, et non à gaver des actionnaires.

Même dans une économie socialisée, la prise en compte du coût réel du pétrole est une nécessité. Par conséquent, la clé réside bel et bien dans un changement de nos modes de vie au niveau mondial pour sortir rapidement et durablement de la dépendance au pétrole.

Erika et Amoko (AL 93)

 
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