Sans-papiers scolarisés : régularisation !




À Nantes, Rennes ou Paris, des mobilisations récentes ont permis d’empêcher l’expulsion de jeunes sans-papiers scolarisés. Le développement de ces actions s’appuie sur le réseau Éducation sans frontières, rassemblant depuis le mois de juin 2004 plus d’une quarantaine d’organisations syndicales, politiques, d’associations, de collectifs locaux.

Ils sont sans doute plusieurs milliers : jeunes lycéens risquant l’expulsion à leur majorité parce qu’ils ne rentrent pas dans les catégories de la loi, enfants scolarisés dont la famille est sans-papiers ou déboutée du droit d’asile. Leur expulsion - seul ou avec leur famille - se manifeste souvent par leur absence en cours, la plupart du temps sans que personne, profs ou copains de classe, n’en connaisse la raison.

En début d’année, dans la foulée de la loi Sarkozy sur l’immigration, la « course aux chiffres » a entraîné la multiplication de ces arrestations d’élèves dans les écoles, les expulsions de familles. Dans quelques écoles, des mobilisations parfois massives se sont développées pour empêcher ces expulsions et exiger la régularisation. Au lycée de Châtenay-Malabry (92), une mobilisation autour de trois lycéens sans-papiers permettait de gagner la régularisation. À Paris dans le XIXe arrondissement, ce sont tous les parents d’élèves d’une école maternelle qui, après avoir multiplié les occupations de l’école, obtenaient début 2004 la régularisation d’une famille et par le même coup d’un enfant de 4 ans.

Tirant le bilan de ces mobilisations et de l’urgence de développer une plus large solidarité, se constituait en juin 2004, à l’initiative d’enseignants, de syndicats, et d’associations de défense des étrangers, le réseau Éducation sans frontières. Ses objectifs étaient multiples : collectiviser les expériences de luttes, sensibiliser les enseignants, les élèves et les parents d’élèves à la situation des sans-papiers scolarisés, développer les mobilisations locales.

Dès la constitution du réseau, plus d’une quarantaine d’organisations, dont les syndicats de l’Éducation nationale, se retrouvaient autour de l’appel lancé, et permettaient de recenser à Saint-Denis, Evreux, Paris, Stains, Massy, Châtenay-Malabry, Ivry, Vitry, Bordeaux, Le Havre ou Nantes des mobilisations en cours dans les écoles.

À la rentrée de septembre, la popularisation de l’appel a permis l’organisation d’informations collectives dans les écoles. Par ces informations, le réseau souhaitait inciter des élèves sans-papiers à faire connaître leur situation et à envisager le développement d’une solidarité locale. La seconde étape est la parution récente de la brochure d’information « Jeunes scolarisés sans papiers : régularisation mode d’emploi » [1], donnant les clés juridiques et pratiques pour la défense de ces jeunes et l’organisation de mobilisations. Cette brochure, diffusée à 13 000 exemplaires, constitue un véritable outil au service du développement de cette lutte.

Elle pourrait permettre d’amplifier les luttes en cours, comme celle de Nantes où, pendant plusieurs semaines en septembre, des centaines de personnes ont organisé des rassemblements et des occupations (d’école, de mairie) afin d’empêcher l’expulsion de Randy, jeune Congolais de 6 ans et de sa famille.

L’émergence du réseau Éducation sans frontières constitue une nouvelle importante pour les luttes des sans-papiers, qui subissent de plein fouet le délire sécuritaire du gouvernement et la démobilisation militante post mai-juin 2003. En posant la question des jeunes sans-papiers dans les écoles, elle illustre que l’intégration n’est pas une affaire de salut au drapeau ou d’allégeance au « béret-baguette », mais bien de solidarité et de reconnaissance des droits. La force de ces mobilisations récentes et la dynamique enclenchée par le réseau constituent un signe important de la nécessité d’impulser sur les lieux de vie des luttes construisant des solidarités concrètes et des résistances à la société du « chacun pour soi ».

Jérome (CAL Paris-Est)

[1Téléchargeable sur le site www.educationsansfrontieres.org ou sur les sites du Gisti et de la Cimade

 
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