Syrie-Kurdistan

Un communiste libertaire dans l’IFB #01 : « Dans mes chroniques, il y aura de la critique »




« Si j’étais engagé dans la société civile, j’aurais certainement tendance à voir les choses par le prisme des réalisations quotidiennes ; étant dans la lutte armée, je reçois surtout les échos de ce qui ne va pas ! »


Alternative libertaire reproduit les billets du blog Kurdistan-Autogestion-Révolution où, après Arthur Aberlin, engagé au sein des YPG, s’exprime à présent Damien Keller, engagé lui dans le Bataillon international de libération (IFB).

Au fil des semaines, il témoignera de la vie au sein de l’IFB, des débats qui s’y mènent et de l’évolution du processus révolutionnaire dans la Fédération démocratique de Syrie du Nord.


Bataillon international de libération,
canton de Cizîrê, le 17 janvier 2018

Bonjour à tous et à toutes !

Comme l’a dit précédemment mon camarade Arthur Aberlin, je suis militant communiste libertaire, actuellement présent au Kurdistan syrien. J’y suis arrivé à la fin de l’été 2017, quelques jours après la prise de Raqqa par les Forces démocratiques syriennes, et j’ai intégré le Bataillon international de libération (International Freedom Batallion, IFB).

J’aurai probablement moins de choses à rapporter qu’Arthur, n’ayant pas eu l’occasion de monter au front. Il se peut d’ailleurs que je n’y monte jamais, du fait de l’effondrement de l’État islamique… et à moins que l’État turc lance une offensive contre la Fédération démocratique de Syrie du Nord !

Je vous ferai néanmoins remonter des faits, observés par moi-même ou rapportés par d’autres camarades. Je tâcherai d’ailleurs de recouper les informations, afin de ne pas colporter de rumeurs. Il s’agira aussi d’analyses personnelles, de réflexions sur le processus révolutionnaire en cours.

Une nécessité politique

Dans mes chroniques, il y aura de la critique ; ce sera peut-être même la majeure partie de mes écrits. Deux raisons à cela. La première relève d’une nécessité politique : si on a beaucoup parlé du processus révolutionnaire au Rojava, on n’en a pas suffisamment pointé les faiblesses. La seconde tient tout bonnement à l’endroit où je suis : si j’étais engagé dans la société civile, j’aurais certainement tendance à voir les choses par le prisme des réalisations quotidiennes ; étant dans la lutte armée, je reçois surtout les échos de ce qui ne va pas !

L’extrême gauche française a, dans sa majorité, limité son soutien à la révolution au Rojava à quelques communiqués et à une participation aux manifestations de solidarité. Une minorité lui a même tourné le dos, au motif que cette révolution ne correspondait pas suffisamment à ses « exigences » idéologiques, et qu’elle avait accepté les armes livrées par les États impérialistes au moment du « front commun » contre l’État islamique. Pourtant elle ne l’a fait que parce qu’elle ne pouvait pas escompter une aide logistique conséquente du mouvement ouvrier révolutionnaire international, trop affaibli ou trop sectaire pour cela.

Refuser tout soutien, même minimal, pour ces raisons, c’est risquer l’ethnocentrisme, avec une grille d’analyse inadéquate, centrée uniquement sur les conditions que l’on connaît sur son propre territoire, dans sa propre société. Une telle erreur ne peut conduire qu’à bouder toutes les révolutions non occidentales.
Un véritable engagement de nos organisations est une nécessité. Il suppose un travail d’analyse conséquent, des explications sur le processus révolutionnaire, un soutien financier, un engagement humain (qu’il soit civil ou armé) sans sectarisme ni romantisme révolutionnaire.

Damien Keller

 
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