Echos d’Afrique : Les restes accommodés de l’idéologie coloniale




Le colonialisme, c’est l’idéologie, née au XIXe siècle en Europe, qui justifie la colonisation, c’est-à-dire l’exploitation de territoires par un État à son seul profit et à ceux de ses ressortissants installés sur ces territoires. C’est une culture qui a été instillée dans nos sociétés, et dont on doit se débarrasser en même temps que l’on s’attaque aux structures coloniales encore en place. Mais se défaire d’une idéologie n’est pas chose aisée...

Jusqu’au milieu du XXe siècle, le colonialisme a réussi à susciter une très forte adhésion des populations européennes à l’entreprise coloniale. La droite et les conservateurs y voient avant tout l’intérêt économique  ; tandis que la gauche est séduite par la mission civilisatrice, s’octroyant une forme de devoir moral de partager nos lumières.

Dans cette idéologie, le racisme joue un rôle primordial et trouve de multiples formes  : scientifique avec la théorie des races  ; éducatif à travers les programmes scolaires  ; culturel au travers de livres, œuvres diverses, chansons, sans oublier les expositions coloniales comme celle de 1931 à Paris où des millions de visiteurs purent, entre autres, admirer des Kanak jouer les sauvages cannibales… une mise en scène grotesque cherchant à coller aux clichés coloniaux.

Aujourd’hui la colonisation est largement moins populaire, mais le colonialisme a laissé des traces encore bien vives dans nos cultures et donc dans nos esprits (y compris à gauche  !). L’anticolonialisme apparent dans de nombreux discours cache bien souvent des formes de racisme et de paternalisme qui légitiment les nombreux «  restes  » de colonisation  : présence armée, domination politique et culturelle, prédation économique, etc.

Dans les discours officiels, la nécessité de «  civilisation  » a cédé la place à l’exigence de «  démocratie  » (comme si nous avions des leçons à donner en la matière), de «  sécurité  » ou de «  stabilité  », argument majeur dans les relations avec les pires dictatures. Dans les manuels scolaires, la réalité de la colonisation est euphémisée, et le racisme nié  ; tandis que la décolonisation est supposée être arrivée «  progressivement et sans conflit sanglant hormis en Algérie  »… passant sous silence les innombrables violences de cette période, et notamment la guerre du Cameroun qui fit des centaines de milliers de morts  !

N’oublions pas la loi du 23 février 2005 portant sur le «  rôle positif de la colonisation  » dans les manuels scolaires (dont une partie fut abrogé le 15 février 2006), reflet de la place encore importante de ces idées dans la société et dans les sphères de pouvoir. Serait-ce une question de génération  ? Quoi qu’il en soit, il faut poursuivre la dénonciation de la colonisation, tout en soutenant l’émergence de toute les formes de cultures décoloniales qui fleurissent un peu partout.

Noël Surgé (AL Carcassonne)

 
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