Espagne : La CGT ne sous-traite pas




La CGT espagnole, première organisation rouge et noir dans le monde, fête cette année cent ans d’anarchosyndicalisme. Le point sur ses activités, aux côtés des salarié-e-s du monde entier, de Malaga à Khouribga, en passant par Valence...

« Il y a maintenant cent ans, le courage et la rébellion d’une poignée de femmes et d’hommes firent que le monde commence à changer de base », proclame aujourd’hui la Confederación general del trabajo (CGT). En 1910, en effet, le Congrès de Barcelone fondait la CNT, dont la CGT est aujourd’hui l’héritière [1]. Issue des associations de solidarité ou-vrière du début du XXe siècle et des mouvements anarchistes, elle fut un acteur central de la Révolution de 1936, de ses réussites et de ses échecs, puis de la résistance au franquisme.

Pour apprécier la situation sociale actuelle en Espagne, mieux vaut garder en tête quelques chiffres saisissants : le chômage frôle les 20 % et plus de 60 % des salarié-e-s sont mileuristas (ce qui signifie qu’ils gagnent moins de 1 100 euros par mois) [2]. C’est dans ce contexte qu’évolue la quatrième force syndicale espagnole, qui est également l’organisation anarcho-sydicaliste la plus importante du monde avec 80 000 adhérentes et adhérents.

Contrats de trois mois

La CGT a ses bastions dans l’automobile et dans les grandes entreprises publiques. Mais à la manière de Sud-Rail à la SNCF, elle cherche autant à syndiquer les salarié-e-s de ces grandes entreprises publiques que celles et ceux qui travaillent pour leurs sous-traitants.

Ces dernières années, la confédération s’est également développée dans les télécommunications, le nettoyage, la santé, et chose plus rare, le télémarketing.

L’implication internationale de la CGT est très développée, en particulier avec les pays du Maghreb, où les libertés syndicales sont bien souvent maltraitées. Ainsi, une délégation de la confédération est partie à la rencontre des travailleurs d’une filiale marocaine de l’OCP, en décembre dernier. Contre les 850 licenciements, ceux-ci ont décidé de s’organiser en dehors des syndicats institutionnels. Leur objectif : être réintégrés, sans accepter les contrats de trois mois qui leur sont proposés. La portée de leur lutte, contre la première entreprise publique du Maroc – par ailleurs largement bénéficiaire – prend un sens international partout où il est impossible de se syndiquer.

À Málaga, c’est tout un groupe de chauffeurs de taxis salariés qui a décidé de rejoindre en bloc la CGT.

La CGT roule en taxi

En effet, de nombreuses entreprises, prises de panique, virent celles et ceux qui adhèrent au syndicat rouge et noir, malgré l’assise qui devient la sienne. Alors soyons sûrs que cette adhésion groupée aidera la mairie à arrêter le favoritisme et à faire respecter leurs droits !

De même, la CGT mène la lutte à Valence auprès des employées du nettoyage, dans une boîte qui sous-traite pour BBVA (la deuxième banque en Espagne et en Amérique du Sud). Alors qu’elles travaillent déjà à temps partiel, la banque a voulu encore abaisser les coûts pour ces femmes qui gagnent autour de 300 euros par mois, en leur enlevant des heures. Résultat, encore plus de transports pour se rendre dans les différentes succursales et encore moins d’argent à la fin du mois.
Pourtant, comme en France, les banques sont grassement aidées par l’État, ce qui leur garantit encore des bénéfices supplémentaires. Organisées en assemblée, les nettoyeuses ont décidé de manifester toutes les semaines pour se faire entendre.

Cet exemple, comme le précédent, montre que c’est dans les secteurs les moins privilégiés que la CGT a décidé de s’impliquer, en organisant la solidarité entre salarié-e-s, ce qui ne manque pas de lui donner du crédit. Ainsi, aux dernières élections professionnelles, et quoique la valeur de ce chiffre puisse être débattue, plus d’un million de salarié-e-s espagnols ont fait confiance à la CGT.

Manu (AL Paris Nord Est), depuis Valence

[1La CGT a dû abandonner ses initiales historiques CNT en 1989, une autre organisation nommée CNT l’ayant attaquée en justice.

[2Source : CGT Catalunya.

 
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