Fraude fiscale : Le compte n’y est pas !




Après les charges du hussard Wauquiez sur le cancer de la société, puis le projet de sept heures de travaux obligatoires pour les bénéficiaires du RSA, c’est au tour du général Sarkozy de surenchérir sur la fraude sociale.

Rappelons tout d’abord que la fraude sociale englobe fraudes aux prestations sociales mais aussi fraudes aux prélèvements. Et si l’argumentaire de notre président se base sur le rapport Tian [1], celui-ci précise que le coût de la première serait de 2 à 3 milliards d’euros alors que celle aux prélèvements n’atteindrait que 8 à 15 milliards.

[*Le jeu des chiffres …*]

La vérité semble éclater quand on lit qu’il y a 10 à 12 % d’entreprises en infraction contre 5 à 7 % de bénéficiaires d’allocations sociales qui ne déclarent pas leurs revenus réels. Les principaux responsables de la fraude sont donc les patrons… Mais sur 53 recommandations du rapport, seules quatre traitent du travail non déclaré, et ce n’est que la continuité d’une politique de cadeaux aux plus riches.

De plus, selon une communication de la Cour des comptes d’avril 2010 [2], le préjudice financier semble bien moins important qu’on nous le dit, car la caisse d’allocations familiales récupère en moyenne 88 % des sommes fraudées. Sur les 457 millions d’euros récupérés, 300 millions concernent les prestations sociales et 150 millions seulement concernent les fraudes aux prélèvements. Le gouvernement semble se tromper de cible puisque les plus gros fraudeurs sont les patrons et les plus contrôlés sont encore une fois les bénéficiaires des minima sociaux. Les trois milliards d’euros attribués à la fraude aux prestations sont dérisoires lorsqu’on les compare au chiffre de l’évasion fiscale qui serait compris entre 50 et 73 milliards d’euros.

[*Le RSA, une aubaine pour l’État*]

Le Comité national d’évaluation du RSA rendait sa copie à Roselyne Bachelot le 15 décembre. Les deux tiers des bénéficiaires du complément RSA ne le réclament pas, il en est de même pour un tiers des chômeurs en fin de droit. La principale raison de ces découragements : le RSA est une usine à gaz bien plus complexe que le RMI. Le rapport précise que 30 % des foyers qui ne demandent pas le RSA y renoncent « par principe, parce qu’ils n’ont pas envie de dépendre de l’aide sociale ou de devoir quelque chose à l’État ». Il y a aussi le manque d’information : sur 3 500 personnes interrogées, la moitié des travailleurs précaires ne savent pas qu’il y a possibilité de cumuler travail et RSA. Le résultat ? L’État a économisé 5,3 milliards d’aides non distribuées en 2010. Le rapport finit pourtant par un non-sens en concluant qu’une meilleure information, pour souhaitable qu’elle soit, ne suffira pas à résoudre le problème...

[*Culpabilisons l’usager !*]

Il suffit de se rendre dans une caisse d’allocation pour comprendre à quel point les allocataires sont culpabilisés. Dès l’entrée, on aperçoit un panneau retraçant toutes les fraudes, épinglées avec le nom des fautifs. Une propagande sur le thème « Frauder l’État, c’est voler » couvre les murs, avec des affiches en orange ou vert fluo, ce qui complète l’ambiance. Voilà comment on pousse à renoncer à ces aides.

Et pour celles et ceux qui voudraient toucher leur dû, le parcours du combattant commence pour obtenir du Pôle emploi un refus d’allocation spécifique de solidarité afin de remplir une demande de RSA à la Caf. Les délais d’attente pour le RSA sont variables d’une région à une autre, mais comme la mode est à fermer l’accueil au public pour rattraper le retard dû au manque de personnel, ils s’aggravent. En cas de changement de situation (mariage, pacs, etc.) ou déménagement, le délai d’attente reprend. Il n’y a bien sûr aucune possibilité pour l’allocataire de réclamer une aide d’urgence, histoire de couvrir les frais éventuels occasionnés par ces retards. Pourtant, les contrôles domiciliaires vont se multiplier, véritables intrusions d’un conseiller Caf au domicile, pour « vérifier » que les bénéficiaires du RSA ne fraudent pas ! Un guide survie face au contrôle domiciliaire existe, on ne saurait que trop le conseiller ! [3]

Ronan (AL Lorient)

[1Rapport Tian, en ligne sur www.assemblee-nationale.fr

[2Rechercher lutte contre fraudes branches prestataires régime général sur www.ccomptes.fr

[3http//cafard93.wordpress.com/

 
☰ Accès rapide
Retour en haut