Le Dico anticolonialiste : Qu’est-ce que “ le racisme postcolonial ” ?




Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible, par Gisèle.


Pointer les origines coloniales de certaines formes contemporaines de racisme amène à évoquer les systèmes esclavagistes et coloniaux. Les institutions, les pratiques, les discours et les représentations élaborés sous l’empire colonial français en constituent le socle.

Le passé colonial de la France marque d’une empreinte indéniable le vocabulaire de la coopération, de l’immigration, de l’intégration et de la mémoire. De plus, les discriminations à l’encontre des descendantes et descendants d’immigré-e-s originaires de pays colonisés tendent à se pérenniser d’une génération à l’autre, signe d’un racisme profondément ancré qui va bien au-delà de la xénophobie envers les dernières et derniers arrivé-e-s.

Il convient de distinguer le stigmate xénophobe, qui existe sous une forme exacerbée pour les nouveaux arrivants, et le stigmate raciste, qui cristallise des représentations beaucoup plus profondément enracinées, et qui perdure avec le renouvellement des générations et leur enracinement en France.

Cette construction infériorisante de la figure forcément suspecte et menaçante de l’immigré-e crée des situations de domination, d’exclusion et de relégation sociale. La négation d’un processus de production permanente des discriminations en masque le caractère systémique et institutionnel. C’est la transmission d’un imaginaire social issu de la colonisation qui sert de prisme à l’appréhension de la réalité vécue.

Un mécanisme d’ethnicisation et d’essentialisation culturaliste est mis en œuvre pour imposer aux Françaises et Français issus de la colonisation une injonction à l’invisibilité et à l’apolitisme. Dans le cas contraire, ils sont « coupables » dans le cas contraire, de refus d’intégration.

Ainsi, le système postcolonial reproduit les mêmes opérations de division et de compartimentage des individus qui fut celui du système colonial : une masse à éduquer et intégrer, une masse à réprimer, une élite à promouvoir, des femmes à « émanciper ». Dire qu’il existe un racisme postcolonial ne revient pas à dire que ce racisme est le seul à l’œuvre.

Souligner les origines coloniales de certaines formes de racisme ne revient pas à nier l’existence d’autres. Parler de racisme postcolonial n’est pas non plus prétendre que les descendantes et les descendants de colonisé-e-s vivent une situation identique à celle de leurs ancêtres, mais affirmer une filiation ou un héritage.

 
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