Lire : Orwell, « À ma guise, chroniques 1943-1947 »




Les éditions Agone ont traduit et édité une partie de l’œuvre de George Orwell pour laquelle il est relativement peu connu : celle de journaliste. « As I please » (« À ma guise ») était le titre de la rubrique hebdomadaire que l’auteur de 1984 ou d’Hommage à la Catalogne a tenue dans le journal de gauche Tribune, entre 1943 et 1947. Entre le billet d’humeur et l’éditorial, « À ma guise » donnait chaque semaine à lire des vérités à contre-courant, et c’est un plaisir instructif de les lire à soixante ans de distance. Si Orwell approuvait la guerre contre l’Allemagne, il se refusait à céder au nationalisme, et à épouser les discours officiels de la bourgeoisie et des médias britanniques. Qu’on imagine le courage qu’il fallait, dans Londres bombardée par les V1, pour écrire que « au regard de ce que nous faisons subir aux Allemands depuis deux ans », cela n’a rien de « barbare » ou « inhumain » – Orwell avait lui-même vu sa maison détruite par un V1. Orwell ne reculait d’ailleurs pas devant un certain cynisme provocateur. À une bonne âme qui écrivait qu’il faudrait « humaniser la guerre » en épargnant les civils, il demanda si l’« humanité » consistait à circonscrire la boucherie aux tranchées. Les bombardements aériens avaient révolu cette conception : « les souffrances ont été plus équitablement réparties durant cette guerre que lors de la précédente, estimait-il. L’immunité des civils, qui est une des choses qui ont rendu la guerre possible, a définitivement volé en éclats. »

G. D. (AL Paris-Sud)

• George Orwell, À ma guise, chroniques 1943-1947, 526 pages, Agone, 2008, 26 euros.

 
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