Lire : Schwarzbard, « Mémoire d’un anarchiste juif »




Samuel Schwarzbard, enfant du Yiddishland, est surtout connu pour avoir assassiné de sang-froid le dirigeant pogromiste ukrainien Pétlioura, vengeant le sang juif versé en Ukraine pendant la révolution de 1917. Fait exceptionnel dans les annales de la justice française, il ressortira libre de son procès. Cet évènement donna lieu à la création de la Ligue Internationale Contre l’Antisémitisme, LICA.

De la misère en Ukraine aux pogroms et à ses premiers actes militants lors de la révolution russe de 1905, on suit Schwarzbard dans ses années d’errance et de bohème jusqu’à Paris. Arrivé plus mort que vif gare de l’Est, il est soigné par des travailleurs du rail qui réussissent à l’incorporer dans leur équipe de travail.
Engagé dans la légion, la force de son récit réside dans la froide description qu’il fait de la macabre tragédie de 14-18. Son écriture, époustouflante de vérité, pose encore aujourd’hui la question  : comment ces millions de soldats ont-ils pu s’entretuer et attendre leur propre mort dans une litanie de gémissement et de fracas de corps déchiquetés  ?
Blessé, décoré, puis démobilisé, il repart dans cette Russie où gronde la révolution. À Odessa il devient l’un des animateurs du mouvement libertaire local, qu’il décrit sans concession. Schwarzbard ira sur le front, à la frontière roumaine, défendre la Révolution contre les blancs. La mainmise bolchévique sur l’éducation l’empêchera de créer une école libertaire sur le modèle de l’espagnol Francisco Ferrer. Avant son retour en France, désabusé des échecs de la révolution sociale, il s’engage dans un bataillon qui fait la chasse aux pogromistes. Il finira sa vie en Afrique du Sud, célébré comme un héros de la lutte antiraciste.

Schwarzbard donne un témoignage émouvant autant que réaliste, teinté de messianisme juif révolutionnaire, de tous les grands évènements qui ont marqué l’Europe pendant le premier tiers du XXe siècle.

Jean Marc Izrine (AL Toulouse)

Samuel Schwarzbard, Mémoire d’un anarchiste juif, éditions Syllepse, 2010, 300 p., 22 euros

 
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