Luttes sociales : Élargir les brèches




Les journées d’action et de grève de janvier et de février à la SNCF, dans la santé ou encore à La Poste, qui étaient les premières du genre depuis juin 2003, n’ont pas été marquées par une remontée significative de la combativité. Les taux de grèves oscillaient entre 15 % et 30 % selon les secteurs. La stratégie de divergence des luttes mise en œuvre par la CGT n’a pas aidé à rendre lisibles ces mobilisations qui pourtant portaient sur les mêmes thèmes (emploi, salaire, défense du service public). À ces méthodes de diversion, il faut ajouter un climat social morose encore fortement marqué par la défaite sur les retraites. La politique de classe de Raffarin et de Seillière suscite un mécontentement et une hostilité qui ne se démentent pas, mais qui, faute de relais syndicaux, ne peuvent se traduire en termes d’opposition sociale.

Pour une convergence des luttes

L’état de démission quasi générale du syndicalisme sur la question de l’assurance maladie ne signifie pas pour autant que l’horizon social soit pacifié. L’offensive d’une extrême violence de la droite et du patronat oblige les secteurs les plus combatifs du syndicalisme et des mouvements sociaux à prendre des initiatives et à ouvrir ici ou là quelques brèches.

Ainsi en est-il d’Agir ensemble contre le chômage ! (AC !), de l’Apeis, d’Émancipation (courant syndical continuateur de l’École émancipée), de Stop précarité et du collectif des surveillant(e)s et emplois jeunes qui depuis plusieurs semaines réunissent les associations de luttes, quelques syndicats et les organisations politiques, essentiellement d’extrême gauche, afin de travailler à une convergence des luttes. Une convergence que la plupart de ces mouvements essayent de concrétiser à l’occasion des mobilisations (droits des femmes, contre le chômage) du 6 mars et qui trouvera peut-être un prolongement le 13 mars à l’occasion des mobilisations contre les expulsions initiées par Droit au logement.

Côté intermittent(e)s, leur coordination reste mobilisée à la veille des soirées de remise de trophées (César, Molière) et à quelques semaines de l’ouverture de la saison des festivals qui démarrera avec celui de Cannes. Des manifestations qui pourraient donner lieu à des affrontements avec un gouvernement qui a validé l’accord Medefdt cassant le statut des intermittent(e)s. En effet, nombre d’intermittent(e)s souhaitent remettre en cause le prestige et l’image de marque de manifestations dominées par les paillettes et le business dans une perspective de réappropriation de la création.

Enfin, du côté du secteur public, CGT et FDSU (Fédération des syndicats unitaires, la fédération finances de Solidaires) viennent de lancer une campagne d’action contre la notation au mérite lancée en 2004 par Mer au ministère des Finances et que Raffarin compte étendre rapidement à toute la fonction publique. Les actions prennent plusieurs formes, du boycott des entretiens de notation à la demande de ne participer qu’à des entretiens collectifs ou au refus de signer les contrats d’objectifs à l’issue des entretiens individuels de notation.

L’école en danger

Mais c’est dans l’Éducation nationale que les tensions pourraient se multiplier avec une réduction de 4 000 postes dans l’enseignement secondaire et de nombreuses fermetures de classes dans le primaire alors même que les effectifs des élèves doivent croître dans le Nord, l’Est et en Île-de-France. Beaucoup d’enseignant(e)s pourtant désabusé(e)s après l’issue des grèves du printemps 2003 comprennent que c’est l’avenir de l’école qui est en jeu. Après les rassemblements du 11 février, la grève du 12 mars sera un test. Mais d’ores et déjà nous savons qu’au-delà de temps forts... qui n’engendrent que des temps morts, il s’agit de renouer avec l’auto-organisation qui a fait la force des grèves enseignantes de 2003 et d’exporter de telles méthodes dans les autres secteurs professionnels afin d’élargir les brèches.

L.E., le 19-02-04

 
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