Otan : Obama reconduit l’expansionnisme US




Dans un style différent, avec des choix tactiques moins brutaux, Washington va poursuivre sa stratégie de contrôle des ressources vitales, y compris par la force armée. L’Otan est là pour ça.

L’administration Obama va faire des choix tactiques différents de ceux de l’administration Bush : retrait d’Irak, intensification de la guerre en Afghanistan, fermeture de Guantanamo, fin de la rhétorique de la « guerre au terrorisme ». Mais même avec moins d’arrogance et de scandale, la visée stratégique va rester la même : l’expansionnisme, par la force si nécessaire.

Depuis des mois, un think tank démocrate, le Center for American Progress [1], avait préparé pour la candidate Hillary Clinton, désormais secrétaire d’État à la place de Condoleeza Rice, une « stratégie de sécurité nationale » [2].

Les cibles des États-Unis y sont hiérarchisées de la même façon que par les néoconservateurs :

– les peer competitors (rivaux pour le leadership) sont la Chine et la Russie. Contre eux il s’agit de reconduire la stratégie du containment, comme contre l’URSS durant la Guerre froide. Pas de confrontation directe, mais des attaques contre leurs alliés pour limiter leur zone d’influence. Washington craint que la Chine et la Russie, ennemis traditionnels, ne s’entendent sur certains points. Ils ont par exemple signé le 28 octobre 2008 un accord sur la construction d’un oléoduc Sibérie-Pacifique qui approvisionnera la Chine en pétrole russe.

– les ennemis sont les mêmes que ceux du axis of Evil (l’axe du Démon, qu’en France on traduit par « Axe du mal », édulcorant sa connotation religieuse) défini par l’administration Bush : l’Iran et la Corée du Nord. Le but est de les mettre au pas, et pour cela de préparer une action militaire.

– les pays nuisibles : Syrie, Venezuela, Cuba, Birmanie... Pour ces ennemis secondaires, une action militaire est également envisageable.

L’objectif prioritaire est la réalisation du projet de « Grand Moyen-Orient » défini par l’administration Bush, qui vise à contrôler cette zone, d’Israël au Pakistan, extrêmement riche en ressources pétrolières. Pour cela, l’administration américaine a choisi le conflit armé, que ce soit en Irak ou en Afghanistan… et bientôt en Iran ? Un bouclier antimissile doit être installé par l’Otan dans le sud-est de l’europe (Balkans et Turquie), sur le modèle de celui d’Europe du nord-est contre la Russie.

Tous ces projets bellicistes ne sont pas issus du délire irresponsable de ce pauvre George W. Bush. Déjà en 1993 le démocrate Bill Clinton avait, comme la Chine et l’Iran, refusé des inspections de la convention sur les armes chimiques.

Gagner idéologiquement les « élites »

La propagande de l’Otan est passée à une étape supérieure. Les opérations de com’ se multiplient : l’Initiative de coopération d’Istanbul (ICI), organisme créé par l’Otan pour inciter à des coopérations entre l’Europe du sud-est et le Moyen-Orient, a invité le 10 décembre 2008 au siège de l’Otan, des « faiseurs d’opinion de haut niveau » [sic] des pays du Golfe. Le 4 décembre, c’était des « journalistes israéliens de haut niveau ».

Concernant les Balkans, un train de l’Otan va sillonner la Croatie (candidate à l’adhésion), la Serbie, la Bulgarie et la Turquie. Ce nouvel Orient Express accueillera 30 jeunes, futures élites des 11 pays de la région, et des experts qui auront pour mission de leur expliquer l’intérêt d’adhérer à l’Otan.

Mais la propagande est aussi tournée vers les pays déjà membres : une exposition photographique intitulée « Soldats français au cœur de l’Afghanistan », mise en place par l’armée française et la PDD (division diplomatie publique) de l’Otan, sillonne la France pour glorifier ces valeureux soldats qui défendent la liberté et la démocratie ! Inaugurée le 13 octobre 2008, l’expo s’achèvera à Strasbourg lors du sommet des 3 et 4 avril 2009.

Un troisième front africain

La crise mondiale n’a fait qu’accentuer les rivalités pour le contrôle des matières premières, comme le montre l’affrontement russo-ukrainien autour du gaz. Le développement de la Chine et de l’Inde, grands consommateurs de pétrole, de gaz et de minerais, rend de plus en plus crucial de maîtriser ces ressources. Surtout que les « vieilles » puissances sont en train d’épuiser les leurs : les États-Unis devront importer 66 % de leur pétrole et 20 % de leur gaz en 2030, contre 47 % et 18 % aujourd’hui [3].

Depuis une dizaine d’années, la Chine s’intéresse spécialement au pétrole et à l’uranium africains, jusqu’ici chasse gardée de l’Occident. L’Otan ne veut pas laisser le champ libre à sa rivale. En 2006, 7 800 soldats de l’Otan ont participé à des manœuvres au Cap-Vert, dans le golfe de Guinée, une zone d’exploitation pétrolière de plus en plus importante. Depuis juillet 2005, l’Otan a aidé à acheminer au Darfour puis à rapatrier quelque 24 000 « soldats de la paix » au Soudan, près des champs pétrolifères. En 2008, c’est en Somalie que l’Alliance est intervenue, contre la piraterie. Partout où les intérêts occidentaux sont touchés, l’Otan poste ses troupes !

AL Alsace


<titre|titre=Contre-sommet à Strasbourg du 1er au 5 avril>

Du 1er au 5 avril 2009, en parallèle du sommet de l’Otan, un contre-sommet se déroulera à Strasbourg et à Baden-Baden. Un village alternatif sera ouvert, avec une grande manifestation internationale le samedi 4 avril. La coordination anti-Otan de Strasbourg appelle à bloquer le sommet, comme celui de l’OMC à Seattle, il y a dix ans ! Ci-dessous, un extrait du tract de la coordination, en réaction aux événements de Gaza.

« […] Dès la création de l’État d’Israël, celui-ci est perçu comme un avant-poste de l’Occident et de ses intérêts au Moyen-Orient et dans le monde arabe. Ce statut prend racine dans un fond idéologique et religieux basé sur les liens entre l’histoire de la civilisation occidentale et le sionisme, comme l’a déclaré Tzipi Livni, Première ministre d’Israël : “L’Otan et Israël sont des partenaires naturels et des alliés stratégiques. La civilisation occidentale et la communauté atlantique, que défend l’Otan, sont l’habitat naturel d’Israël.” […]

En 1994, le conseil de l’Otan lance la création du Dialogue méditerranéen. Le but est d’entretenir un dialogue avec les sept pays membres (Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Maroc, Mauritanie, Tunisie) sur les questions sécuritaires dans la zone en ignorant totalement la Palestine et les perspectives de création de l’État palestinien.
Mais le partenariat spécifique entre l’Otan et Israël débute en 2001 avec un accord de sécurité concernant l’information. En 2005, l’Otan organise avec Tsahal des manœuvres navales dans les eaux nationales israéliennes.
[…]

Depuis 2006, Israël est systématiquement invité à participer aux activités militaires et se permet même de critiquer l’Otan lorsque celle-ci ne lui apporte pas le soutien escompté notamment lors de la guerre au Liban. […]

Le partenariat économique privilégié entre Israël, les États-Unis et l’Europe, ainsi que le partenariat militaire avec l’Otan, confortent le gouvernement israélien dans son impunité.

Ne laissons plus faire : Toutes et tous contre l’Otan ! »

Coordination anti-Otan Strasbourg

http://sommet-otan-2009.blogspot.com/

[2Pierre Conesa, Le Monde Diplomatique, avril 2008

[3Emmanuel Todd, Après l’empire. Essai sur la décomposition du système américain, 2007

 
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