Prisons et liberté : Notre amour de la liberté est plus fort que vos murs




Aujourd’hui l’État use de tous les systèmes qui lui sont accessibles pour mettre à l’écart les personnes qu’il juge indésirables ou pouvant nuire à « l’ordre républicain » : notamment les « marginaux » et les mal-normé-e-s dans les prisons. Mais au juste, la prison, c’est quoi  ?

Qu’ils soient de «  gauche  » ou de droite, les gouvernements successifs s’appuient sur un système carcéral liberticide et déshumanisant pour mater un peu plus les populations  : «  Entre 2001 et 2013, la population sous écrou (prison, semi-liberté, bracelet électronique) a augmenté de 70% (de 47.000 à 80.700)  » [1]. Les conditions de détention empirent de jour en jour. Si cela ne suffisait pas, les mesures
mises en place au sein des prisons sont de plus en plus strictes  : interdiction de visite à la moindre «  révolte  », renforcement des caméras ou bien encore complexification des démarches des proches pour avoir un «  permis  » ! Le plus souvent, les incarcéré-e-s qui osent se révolter contre ce système le paient de leurs conditions de détention. Et parfois ça dérape, comme le prouve très récemment l’agression du jeune Deniz à la prison de Fleury-Mérogis par ses geôliers, agression qui l’a plongé dans le coma  [2]. Le système carcéral est violent par son existence même mais aussi par les pratiques inhumaines qui sont perpétrées en son sein.

Esclavagisme interne

Et que dire des mesures en place dans les prisons  ? Quel est le sens de travailler pour 1,50 euro de l’heure à confectionner des objets utiles à personne, sauf au capital esclavagiste, contre une hypothétique promesse d’aménagement de peine. Le capitalisme et ses multinationales ne sont pas en reste pour profiter de ce système. De grandes sociétés du bâtiment construisent les prisons, de grandes multinationales investissent dans les prisons, comme Sodexo pour les cantines. Et bien sûr si le travail est obligatoire en prison il se fait rare. Objet de récompense, il s’effectue, bien entendu, sans contrat, hors des réglementations du droit du travail, et même selon le rapport du très peu libertaire contrôleur général des lieux de privation de liberté, hors du minimum de cadre imposé par la loi  [3].

La prison et ses fonctions

Mais quel est le sens de tout cela ? Est-ce une « nécessité » par laquelle on serait obligé d’en passer afin de réintégrer le « délinquant » à la société ? Non point. Le rôle social de la prison tel qu’analysé par Michel Foucault est justement à l’opposé de cette fable sociale-bisounours  : « La prison, ç’a été une fabrique de délinquants ; la fabrication de la délinquance par la prison, ce n’est pas un échec de la prison, c’est sa réussite, puisqu’elle était faite pour ça. » Ainsi la prison ne sert pas à réinsérer mais, dans le cadre d’une société de la propriété privée, à établir des marqueurs sociaux : « La prison permet de garder le contrôle sur les illégalismes  ; en excluant par ces effets toute réinsertion sociale, elle assure que les délinquants resteront délinquants et que, d’autre part, ils demeureront, puisqu’ils sont délinquants, sous le contrôle de la police et, si l’on veut, à sa disposition. » [4]

Comment pourrait-il en être autrement ? La prison est le prototype de la société punitive, l’arbitraire y règne et les interdits ont force de loi. Comment dans ces conditions prétendre (ré)-éduquer, (ré-)insérer  ? La société d’ailleurs ne s’y trompe pas puisque l’ex-detenu.e est marqué-e à vie du sceau de l’infamie, une tâche sociale difficilement effaçable. Contre toutes les formes d’enfermement, contre toutes les prisons, contre cet outils de l’État pour réprimer l’émancipation des peuples, liberté de toutes et tous les prisonniers  !

David et Vince (AL Paris Nord-Est)

[1Voir le site de la revue L’Envolée

[4Michel Foucault, « Point de vue » in Dits et Écrits III, Gallimard, 1994, pp. 93-94.

 
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