Rentrée sociale : Cinq défis lancés par Macron




L’acte II du gouvernement ressemble comme deux gouttes d’eau à l’acte I : autoritarisme, casse sociale, fuite en avant productiviste malgré la crise écologique. En juillet, les Rencontres d’été rouge et noir organisées par l’UCL ont débroussaillé ­certains des sujets qui vont rythmer l’année à venir.

La rentrée s’annonce chargée en mobilisations avec, dès le 3 septembre, des rassemblements pointant les responsabilités de l’État dans les féminicides. Ce jour-là, Marlène Schiappa lance un « Grenelle des violences conjugales ». Un nouveau coup de com’, après celui en 2017 sur l’égalité femmes-hommes déclarée « grande cause nationale ».

En juillet, 150 personnes – dont le groupe UCL de Saint-Denis – se sont rendues devant le commissariat auquel Leila, la 74e femme à mourir sous les coups de son conjoint depuis le début de l’année, avait demandé en vain une protection. Le 6 juillet à Paris, 2 000 personnes ont réclamé des mesures immédiates. Depuis, plusieurs femmes ont été assassinées, portant le nombre de féminicides à 85 pour 2019.

Toujours à la rentrée, plusieurs grèves sectorielles vont se succéder. Dans la santé le 11 – alors que la grève dans les urgences s’est poursuivie tout l’été  [1] –, à la RATP le 13, aux impôts le 16, puis le 19 à EDF. Parallèlement, les gilets jaunes, qui n’ont pas totalement disparu pendant la pause estivale, testeront leur capacité à rebondir. En plus de ces rendez-vous, plusieurs sujets vont s’imposer à nous.

Climat : un mépris affiché

En juillet, le ministère de la Transition écologique est passé aux mains d’Élisabeth Borne, qui traîne un CV particulièrement anti-écolo. Sous Hollande, puis sous Macron, elle a œuvré à la privatisation des autoroutes, à celle d’ADP, à la casse du secteur ferroviaire et à la promotion du transport aérien, gros émetteur de gaz à effet de serre [2]. Sa nomination est une insulte à l’idée même de « transition écologique ».

Une semaine internationale de mobilisation pour le climat est annoncée entre le 20 et le 27 septembre. Le vendredi 20, la jeunesse appelle pour la première fois l’ensemble de la population à une grève globale. Quelques syndicats soutiennent la démarche en Angleterre, en Allemagne, aux États-Unis ou en France. Plus classiquement, des marches pour le climat se tiendront le samedi 21 septembre, même si des actions visant directement les énergies fossiles sont aussi programmées ce jour-là.

À nous de souligner l’incompatibilité du système capitaliste avec la préservation de la planète, alors qu’à l’échelle mondiale les émissions de gaz à effet de serre ne reculent pas et que la biodiversité s’écroule.

Retraites : travailler plus longtemps, gagner moins

La bataille des retraites s’amorce. Le 18 juillet, le haut-commissaire Delevoye a dévoilé ses ­préconisations : fin de tous les régimes spéciaux ; remplacement des trimestres cotisés par des points dont la valeur, fixée par le gouvernement, ne sera connue qu’au moment de faire valoir ses droits ; instauration d’un âge d’équilibre à 64 ans, évoluant en fonction de l’espérance de vie et incluant une décote en cas de départ antérieur. En résumé : il faudra travailler plus tard pour bénéficier d’une retraite à taux plein, et les pensions baisseront avec la fin de la prise en compte des 10 (dans le public) ou 25 (dans le privé) meilleures années dans le calcul des droits.

Édouard Philippe recevra les organisations syndicales et patronales les 5 et 6 septembre pour « construire la méthode et le calendrier de concertation » en vue d’une présentation du projet de loi en conseil des ministres en fin d’année et d’un débat parlementaire probablement au lendemain des municipales de mars 2020. Du côté des mobilisations, FO manifestera en solo le samedi 21 septembre, et la CGT trois jours plus tard. Bref, une bataille d’ensemble reste à construire.

Chômage : liquider les droits des précaires

Le dossier de l’assurance-­chômage mobilise peu. Pourtant, l’attaque est majeure. Le gouvernement va réaliser 3,4 milliards ­d’économies sur le dos des chômeuses et des chômeurs. À compter du 1er novembre, il faudra avoir travaillé six mois sur une période de vingt quatre mois pour ouvrir des droits aux allocations, au lieu de quatre mois sur vingt huit aujourd’hui. De la même façon, il faudra totaliser six mois de travail au lieu de un pour recharger ses droits.

Comme le dispositif minimaliste de bonus-malus pour les entreprises abusant des contrats courts ne modifiera pas la précarité du travail, ce sont les chômeurs qui en paieront le prix. Selon une étude de l’Unédic, à ce régime, plus de 1 million de chômeurs verront leurs droits réduits ou supprimés [3]. D’autant qu’à partir du 1er avril 2020, le mode de calcul des indemnités journalières va également changer, induisant une baisse des revenus des personnes alternant périodes de travail et de chômage.

Les luttes des chômeurs et précaires pourraient prendre une nouvelle dimension lorsqu’ils et elles seront exclus en masse de l’indemnisation chômage à partir du mois de novembre.

L’opposition à la privatisation d’Aéroports de Paris (ADP) – votée avec celle de la Française des jeux, et avec la cession de la part de l’État dans Engie – va occuper l’espace. Le délai pour recueillir 4,7 millions de signatures pour réclamer un référendum court jusqu’au 12 mars 2020. Rappelons que la procédure du référendum d’initiative partagée (RIP) est conçue pour que le référendum n’advienne jamais [4].

Privatisations : le cas Aéroports de Paris

Néanmoins, vu les enjeux ­écologiques et sociaux, cette question va polariser les débats politiques au moins jusqu’aux municipales. L’occasion d’animer un vaste débat sur la destruction des services publics – écoles fermées, rail ouvert à la concurrence, autoroutes bradées aux monopoles – et plaider pour leur réappropriation sociale, leur réorientation au service des populations et leur gestion directe par les travailleuses et les ­travailleurs.

SNU : la soumission de la jeunesse

Enfin, il va falloir se mobiliser contre l’embrigadement de la jeunesse que représente le Service national universel (SNU). Avec ce dispositif, le gouvernement confirme le tropisme autoritaire du quinquennat d’Emmanuel Macron, après la répression des manifestations et sa politique inhumaine vis-à-vis des migrantes et migrants. Dès cette année, 40 000 jeunes de 15 et 16 ans devront effectuer deux fois ­quinze jours de service national, où se mêleront garde-à-vous, Marseillaise, initiation à la défense et autres réjouissances patriotes et militaristes. À l’horizon 2021, 800 000 jeunes seront touchés par cette entreprise d’encadrement et de soumission.

Avec un collectif unitaire d’associations et d’organisations syndicales et politiques, l’UCL réclame l’abandon du SNU dont le coût est estimé à 1,5 milliard d’euros par an. Une véritable campagne s’annonce dans les mois qui viennent.

Stéphane (UCL Montpellier)

[1«  Grève aux urgences  : Le retour des coordinations de grévistes  ?  », Alternative libertaire, juillet-août 2019.

[2« Élisabeth Borne, à elle de vous faire préférer l’avion », Libération, 17 juillet 2019.

[3Les Échos , 4 juillet 2019.

[4«  ADP : pourquoi refuser la grande braderie macronienne  », Alternative libertaire, juillet-août 2019.

 
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