Venezuela : Les Insurgentes donnent de la voix




Le 2 décembre 2007, les Vénézuéliens votaient contre la réforme de la Constitution voulue par Hugo Chavez. Ce referendum a fait couler beaucoup d’encre, mais très peu a été dit sur les critiques de gauche contre ce projet.

Depuis quelques années Hugo Chavez se présente comme le leader de la gauche anti-impérialiste. Nationaliste de gauche, proche de Cuba, de l’Iran, il est devenu pour beaucoup le nouvel homme fort de la contestation anti-américaine. Pourtant, des voix se font entendre pour critiquer la réalisation par Chavez du « socialisme du XXIe siècle » à la vénézuélienne.

Au sein même du pays, il faut distinguer deux sortes de contestations : celle de droite, emmenée par la bourgeoisie locale, amplement aidée et soutenue par les États-Unis et les médias, et celle de gauche, qui a beaucoup plus de mal à se faire entendre et qui dénonce l’autoritarisme du président bolivarien.

Analogie entre référendums français et vénézuélien

Comme lors du referendum français sur la Constitution européenne, le camp du Non était partagé entre les personnes qui utilisaient le scrutin comme moyen de renforcer leur propre pouvoir, et ceux et celles qui luttaient sur des bases révolutionnaires et se servaient du referendum de manière stratégique pour enclencher une crise politique du régime.

Bien entendu, la voix de la bourgeoisie vénézuélienne et de l’économie de marché est beaucoup plus audible que celle des militants et militantes de la gauche antichaviste.

Pour lutter plus efficacement, les anti-autoritaires se sont regroupés à l’échelle du pays dans un groupe dénommé Insurgentes (insurgés) et qui a fait campagne contre la réforme constitutionnelle avec comme slogan « Nous ne sommes pas chavistes, nous ne sommes pas “l’opposition”, nous sommes des militantes et des militants des luttes sociales. » De la réforme ils développaient l’analyse suivante :

  • la réforme concentre tous les pouvoirs entre les mains du chef de l’État, en contradiction totale avec le principe de souveraineté populaire ;
  • elle entraîne une bureaucratisation de l’administration, en créant un « pouvoir populaire » prétendant reposer sur les institutions préexistantes ;
  • elle légalise la flexibilisation de la main d’œuvre en faisant croire aux travailleurs et travailleuses que c’est « révolutionnaire » ;
  • elle entraîne une militarisation de la société vénézuélienne ;
  • l’essence capitaliste de l’État vénézuélien ne se réforme pas, mais s’approfondit avec elle [1].

Un résultat qui satisfait tout le monde

La défaite de Chavez et de son referendum le 2 décembre à une très courte majorité peut être vue comme une victoire de la droite et des intérêts pro-américains. Pourtant, il faut aller au-delà et prendre en compte toutes les possibilités qu’ouvre cette défaite à la gauche anti-autoritaire.

Les militantes et les militants groupés autour du périodique El Libertario [2] n’envisageaient tellement pas que la réforme ne soit pas adoptée, qu’ils ont fait campagne pour l’abstention, pour saper la légitimité du résultat du référendum.

Ce résultat inattendu satisfait étrangement les partisans comme les adversaires de Chavez : les uns en prenant cet exemple pour montrer que le Venezuela n’est pas une dictature ; les autres en se réjouissant de la première défaite du futur ex-dictateur.

Mais il offre aussi aux opppsant.es de gauche l’opportunité d’amplifier leurs actions et tenter de reconstruire un mouvement ancré dans les luttes sociales, seules à même de créer une situation authentiquement révolutionnaire au Venezuela.

Valentin (AL Aix)

[1Voir le manifeste adopté par Insurgentes le 30 octobre 2007 à Caracas.

[2Voir leur très bon site internet en espagnol et en anglais : www.nodo50.org/ellibertario

 
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