SNCF : Dans le bourbier des négociations




Neuf jours durant au mois de Novembre, les cheminots ont fait grève contre la réforme de leurs retraites. Malgré cette volonté tenace de combattre et de vaincre, la grève n’a pas abouti. À l’heure où les syndicats « responsables » négocient la régression, les syndicats de lutte refusent toujours de plier sur les revendications des assemblées générales. Pour aller vers un nouveau conflit ?

Depuis la fin du conflit les réunions se succèdent pour, soi-disant, « négocier ». L’État a accepté d’évoquer les trois points de la contre-réforme combattue par les grévistes… sans en changer une virgule. Seul SUD Rail, qui assiste à ces réunions, pour rendre compte de leur teneur, continue à marteler et rappeler les revendications des assemblées générales des grévistes, le refus de ce recul social :
 refus de l’allongement de la durée des cotisations ;
 refus de l’instauration d’un système de décote ;
 refus de l’indexation des pensions sur les prix ;
 refus de l’instauration d’un autre statut pour les nouveaux embauchés.

Des discussions de recul social

Les miettes engrangées lors de ces rencontres s’inscrivent très clairement dans l’allongement de la durée de cotisation. Les cheminot-e-s en grève ont bien compris que leur lutte a été détournée de son objectif premier. Le 6 décembre, une réunion intersyndicale s’est tenue, sans SUD-Rail – pas invitée et exclue après s’y être présentée. La CGT a appelé seule à une grève « carrée » le 13 décembre, pour peser sur les négociations. Le mandat des AG a été délibérément tronqué. Et dès l’allongement du calendrier des discussions acté, le préavis a été levé. La CGC avait fait de même. Les fédérations, sauf SUD Rail, sont satisfaites. Malgré l’allongement des « discussions », il est à craindre que le gouvernement publie les décrets entérinant la contre-réforme dès les premiers jours de janvier. Devant ce risque, FO a proposé une rencontre fédérale, où seul SUD-Rail s’est rendue.

Si les décrets étaient publiés fin décembre ou début janvier, à quoi serviraient les futures réunions avec la direction puisque les points contre lesquels les cheminotes et les cheminots étaient en grève seraient définitivement adoptés ?

La revendication des grévistes du refus de cette réforme, exprimée lors du conflit d’octobre et de novembre, nécessite l’unité la plus large des organisations syndicales. Malheureusement…

Un enterrement de première classe

Le 18 décembre la CGT, la CFTC, la CFDT et l’UNSA ont décidé de proposer une manifestation à Paris pour le 22 janvier. SUD Rail et FO n’ont bien sûr pas été invitées. Elles sont les deux seules fédérations à porter les revendications des AG de grévistes. Les autres fédés CGT de la RATP et d’EDF-GDF appellent à se joindre à cette manif. En 2003 le conflit sur les retraites des fonctionnaires s’était terminé de cette façon. Le 24 janvier, les fonctionnaires seront en grève et dans la rue, dans l’unité syndicale. L’année 2008 commence mal pour les salarié-e-s de ce pays.

Les confédérations syndicales portent une lourde responsabilité dans cet éparpillement revendicatif, qui n’amène que des reculs sociaux. La preuve vient encore de nous en être donnée avec le conflit à la SNCF.

Les cheminotes et les cheminots vont devoir très vite décider de prendre leurs propres affaires en main et s’organiser pour court-circuiter les permanents syndicaux, et autres « professionnels » du syndicalisme, qui veulent leur faire avaler des reculs sociaux majeurs. Il va nous falloir combattre un certain écœurement, du fatalisme aussi, une défiance justifiée envers certains syndicats. Pour essayer d’impulser la bagarre de la dernière chance contre ce projet inégalitaire.

Christian (AL Epinal)

<titre|titre=RATP : Quand le métro bat en retraite>

Sur les rails d’Île-de-France aussi la lutte a été acharnée pour défendre les retraites. Un « preneur d’otages » nous raconte la grève, la tête dans l’étau entre la hiérarchie et les médias qui mentent.

La direction de la RATP ne manque ni d’imagination, ni de volonté pour faire taire tous ces salauds de grévistes (gauchos oui !). Depuis 2003, le « trentième » est la règle. Prévu-travaillant ou de repos entre deux jours de grève, peu importe, tu es pointé gréviste ! En cas d’hésitation sur ta présence : absence illégale. Des méthodes très… patronales. Des règles de sécurités strictes régissent les transports en commun. Mais lors des journées de mobilisation sans précédent, roule qui veut, roule qui peut ! Un Métro pour une ligne et le taulier ouvre au public. Même s’il n’y a pas d’agent en station, roulez, roulez. D’une heure à une heure et demi d’attente… Service, service.

Après une intervention des plus ambiguës de Bernard Thibault dès le 14 novembre, les médias te parlent de « reprise » sans que la grève ait commencé… et de prévisions. Ah ! Les prévisions ! La Direction de la RATP, voulant diminuer l’ampleur de la crise, balance le taux de gréviste entreprise : 25 % (3 500 conducteurs, sur 44 000) ! Alors avec les infos de TF1 t’annonçant 20 % de grévistes à la RATP, ton ticket à la main, tu rencontres la réalité des chiffres : 85 % des conducteurs débrayent ! Ben ouais, ça roule pas. Un métro sur dix en moyenne. Aux heures de pointe, c’est de 35 à 50 métros sur une ligne en semaine normale.

Pendant ce temps-là, en sous-sol, on refait le monde… On y croit. Du 14 au 21 novembre, des débats, des discussions, poussent à la reconduction, sans hésitations. D’ailleurs les chiffres (roulants Métro et RER) sont stables du début à la fin. Mais lorsque l’on aborde la question du retrait total du projet, les jours s’égrainant, la détermination se fait moins ferme, le mental moins « jusqu’auboutiste », ce qui nous conduit au 21 novembre… Audience tripartite de cadrage, on fixe le calendrier des négos quoi ! Cinq rendez-vous prévus du 29 novembre au 11 décembre. Le 22 novembre au matin (vote des assemblées générales vers 10h00), on sent les discussions s’animer : « Je ne vais pas faire grève jusqu’au 11 décembre, pour “peser” sur les négos… » ; « Il faut maintenir la pression au moins jusqu’au lundi 29 novembre. » ; « Que disent les syndicats ? » ; « Le gouvernement est obligé de tenir compte de la mobilisation… je roule demain ! ». Les avis sont tellement partagés qu’ils nous départagent sans appel… On reconduit jusqu’au lendemain (23 novembre) et roule qui veut (ou travaille, il y a aussi des agents de station et des gares…), plus de 60 % des roulants retravaillent le vendredi…

Lundi… Le service est donc de nouveau normal. Les métros sont bondés, le matériel obsolète, en attente de rénovation (une réforme ?), les trains sont en retards, annulés, trop chargés, hors d’âges… Avec une perspective, un jour, la retraite.

Au fait, quand le 12 décembre la CGT a déposé un préavis de 24 heures, là, les usagers sont restés libres de choisir leur mode de transport.

Stéphane, agent de station RATP,
militant syndical

 
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