Pacte de compétitivité : Pour les patrons, c’est dans la poche




C’est officiel, le gouvernement a décidé de mener une politique de lutte de classes. Simplement, il a choisi de défendre, dans cette lutte, les intérêts des capitalistes et non ceux des travailleurs et des travailleuses. En effet, sous l’annonce d’un « choc de compétitivité », c’est un transfert massif de richesses du salariat vers le capital qui va être mis en place par le gouvernement.

Lorsqu’un gouvernement ne sait plus quoi faire pour servir les intérêts des puissants, quoi de plus simple que de demander au patronat lui-même d’écrire le programme ? De fait, le rapport commandé par le gouvernement « socialiste » à Louis Gallois, grand patron « de gauche » – comme si ce n’était pas une contradiction dans les termes – et rendu public le 5 novembre, s’appuie pour l’essentiel sur des rapports écrits antérieurement par diverses officines patronales. Rien d’étonnant alors à ce que ce rapport ait déclenché l’enthousiasme du Medef comme de l’UMP. Mais il n’est pas beaucoup plus étonnant qu’il ait aussi provoqué celui de ce gouvernement, dont toute l’action depuis six mois montre qu’il entend poursuivre la même politique que son prédécesseur.

De fait, Jean-Marc Ayrault a annoncé fièrement que l’essentiel du rapport Gallois serait repris dans un Pacte pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, entérinant la volonté du gouvernement de se plier aux moindres exigences patronales. Il l’avait déjà montré en obtempérant sans combattre aux exigences du mouvement des Pigeons, affirmant par là que le fruit du travail des salarié-e-s doit revenir à ceux qui les exploitent. Les trois mesures phares de ce pacte témoignent à nouveau de cette allégeance.

Donner toujours plus aux exploiteurs...

Colloghan

D’un côté, le gouvernement annonce des cadeaux fiscaux de 20 milliards en faveur des entreprises, au prétexte de rétablir la « compétitivité » de la France dans la « compétition internationale ». En apparence, les mesures proposées vont donc bénéficier à tout le monde : grâce à ce regain de compétitivité, les entreprises menacées de délocalisation vont être maintenues sur le territoire national et les emplois sauvegardés. Mais loin de ce mythe d’un intérêt commun aux capitalistes et à ceux et celles qui travaillent, il ne s’agit là que de permettre aux capitalistes de rétablir leurs profits émoussés par la crise. Pour abaisser le prix des marchandises françaises sur le marché international, il suffirait aux capitalistes de diminuer les dividendes qu’ils s’octroient et qui sont manifestement responsables de la fameuse baisse de compétitivité qu’ils conspuent.

Ce sont ces dividendes, qui ont explosé ces dernières décennies, qui pèsent dans le prix des marchandises, et non les salaires ! En effet, les dividendes atteignent aujourd’hui 9 % de la valeur ajoutée contre 2,5 % au début des années 1990. Pourtant, cela ne suffit pas encore aux yeux des possédants, et comme les crédits d’impôts offerts par le gouvernement ne sont soumis à aucune condition, il est plus que probable qu’ils serviront à augmenter encore un peu plus le revenu des actionnaires. En guise d’arme de guerre contre des utilisations inadéquates des marges supplémentaires engendrées par ces baisses d’impôt, le gouvernement ne propose en effet que la « transparence » : « Les comités d’entreprise devront être régulièrement informés de l’utilisation du crédit d’impôt ».

Aucune règle ferme, aucune sanction prévues : ces crédits d’impôt sont donc clairement des chèques en blanc dont les patrons feront ce que bon leur semble. Pendant ce temps-là, les salaires continueront de baisser, les plans sociaux de se multiplier, les entreprises à délocaliser sous les lamentations pathétiques d’Arnaud Montebourg.

… et appauvrir les travailleurs

De l’autre côté, le gouvernement entend financer ces cadeaux au patronat d’une part par des baisses des dépenses publiques, « réformes structurelles » qui se traduiront par de nouvelles offensives contre les services publics, dans la droite ligne de la politiques menée par Nicolas Sarkozy, et d’autre part par une augmentation de la TVA. Les deux opérations se feront au détriment des classes populaires. En effet, le taux normal de TVA va passer de 19,6 % à 20 %, occasionnant une augmentation du prix des biens de consommation. Certes, la TVA sur les produits de première nécessité va être abaissée de 5,5 % à 5 %, mais cette baisse permettra au mieux de compenser la hausse du taux normal, alors que les difficultés liées à la crise exigent une baisse massive du coût de la vie pour celles et ceux qui galèrent. L’augmentation de la TVA est d’autant plus injuste que cet impôt n’est pas progressif et s’applique indifféremment aux plus modestes et aux plus fortunés.

En réalité, il touche même davantage les plus pauvres, qui consomment la totalité de leurs maigres revenus, tandis que les nantis peuvent épargner une partie de leurs revenus sur laquelle ils ne paient aucune TVA. Les pauvres paient donc relativement plus de TVA que les riches.

C’est la raison pour laquelle le patronat, et le gouvernement à sa suite, la considèrent comme devant être la cible privilégiée des augmentations d’impôt. C’est le retour de la TVA dite « sociale », dénoncée par Hollande pendant la campagne présidentielle pour se faire élire, et qu’il décide aujourd’hui de restaurer quelques mois après l’avoir supprimée...

Sortir de l’attentisme

Parallèlement, la grande réforme fiscale elle aussi promise par le candidat, qui prévoyait d’instaurer un impôt très progressif sur l’ensemble des revenus, dont les revenus du capital, par la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, a mystérieusement disparu des grands chantiers du gouvernement. Sans doute son caractère redistributif – cette fois-ci au détriment des riches – lui a-t-il valu un avis défavorable de la part du Medef.

Le schéma est donc clair : on prend dans la poche des travailleurs et des travailleuses pour mettre dans celle des capitalistes. L’ensemble de l’action du gouvernement va d’ailleurs dans le même sens. La construction d’un grand aéroport inutile à Notre-Dame-des-Landes permet de dilapider l’argent public – y compris par la mobilisation des forces de répression – au profit de la multinationale Vinci, à l’heure où, paraît-il, les caisses sont vides. Il est temps pour les travailleurs et les travailleuses d’abandonner toute naïveté face à la présence de la gauche au gouvernement, de reconnaître que les dirigeants actuels sont téléguidés par le patronat et d’amorcer l’affrontement de classe radical qui s’impose.

Vincent (AL Paris-Sud)

 
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